Après une fin d'année marquée par les accords de la COP28 et malgré la sous-performance de l'investissement à impact, comment préparer la transition ? Kim Nguyen, président de Kermit, analyse pour Investir Responsable l'évolution du label ISR.
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00:04 Et nous commençons tout de suite avec Investir Responsable, le rendez-vous dédié à l'investissement durable aux responsables de Smart Patrimoine.
00:10 Nous avons souvent évoqué la nouvelle mouture, la nouvelle version du label ISR sur ce plateau.
00:16 Cette nouvelle version est désormais officielle, politiquement en tout cas,
00:21 et c'est cette nouvelle version officielle qui a donné le la vers l'ouverture finalement d'une mise en pratique ensuite de ce label ISR.
00:29 C'est justement ce que nous allons traiter aujourd'hui avec Kim Heng-Yuen. Bonjour Kim Heng-Yuen.
00:33 Bonjour Nicolas.
00:34 Président de Kermit, alors on ne va pas revenir effectivement sur les différentes étapes,
00:37 mais le comité du label ISR a émis des propositions qui ont ensuite été validées au niveau du ministère de l'Économie et des Finances.
00:44 On a aujourd'hui le nouveau texte du label ISR. Le nouveau texte ne suffit pas à changer radicalement les méthodes d'investissement
00:52 ou les typologies de réflexion sur l'investissement ISR. C'est un point de départ et ensuite ça ouvre des travaux justement
01:01 pour amener les acteurs de l'investissement à faire un pas de plus, si je puis dire, dans cet investissement responsable.
01:10 Vous êtes associé à ces travaux, Kim Heng-Yuen, aujourd'hui où est-ce qu'on en est ?
01:13 Qu'est-ce qui s'est passé depuis l'adoption quelque part de ce nouveau label ?
01:17 Alors c'est intéressant ce que vous dites, c'est qu'effectivement on avait l'impression que la signature par le gouvernement
01:22 du nouveau texte qu'on a eu en décembre était un aboutissement, ce qui est effectivement le cas,
01:26 parce qu'il y avait des longs travaux auparavant qui ont mené à ça. Mais c'est aussi le début de l'ouverture d'une nouvelle phase,
01:32 puisqu'il va falloir se mettre maintenant en ordre de marche. Maintenant qu'on a le texte qui, vous l'assignez,
01:36 non seulement a été adopté en décembre, mais le gouvernement a aussi rajouté des choses qui n'étaient pas prévues.
01:41 Ça fait longtemps que vous suivez le label dans cette émission, il y a eu beaucoup d'errements autour de ça,
01:46 beaucoup de questionnements, et finalement le gouvernement a tranché avec un label qui est très ambitieux aujourd'hui.
01:50 Ça veut dire quoi ? Ambitieux, ça veut dire une marche assez élevée à franchir pour nombre de sociétés de gestion.
01:54 Aujourd'hui le label est vaste, on sait que tout le monde ne passera pas la marche,
01:57 donc il y a maintenant un gros travail de mise en forme sur les sociétés de gestion,
02:00 et puis aussi le label doit se mettre en ordre de marche.
02:03 Et c'est ça qui est intéressant, qu'on ne voit pas bien, c'est que le label, il y a une nouveauté sur la forme,
02:07 ce qu'on appelle la gouvernance, aujourd'hui il y a un permanent, il y a des gens qui travaillent en permanence,
02:11 ce qui n'était pas le cas avant, et du coup le label est vivant.
02:14 C'est-à-dire qu'avant on avait un texte, et puis on se revoit, le texte il était figé, puis quand il est dépassé.
02:20 Aujourd'hui on a une volonté de faire évoluer ce texte, à la fois par rapport au retour du terrain,
02:26 voir ce qui marche, ce qui ne marche pas par rapport au texte, puisqu'on a un texte,
02:29 mais aujourd'hui peut-être que confronté à la réalité, il y a des trous, il y a des choses qui ne sont pas compréhensibles,
02:33 donc il faut le faire évoluer, ça c'est une vraie volonté du comité,
02:35 il y a un travail permanent qui a été mis en place avec des sous-comités qui vont accompagner l'évolution du label,
02:40 et puis aussi il faut accompagner les sociétés de gestion qui vont devoir se mettre en ordre de marche.
02:46 Donc là il y a une période...
02:47 Donc au sein du label ISR, il a été prévu aussi d'accompagner les sociétés de gestion, pas juste effectivement...
02:52 Non, non, non, c'est aujourd'hui, il y a des sous-comités qui remontent, il y a beaucoup de questions qui remontent,
02:55 il y a des sous-comités, il y a des sous-comités, voilà, précision, qui apportent des...
03:00 il y a des points effectivement qui n'ont pas été envisagés pour certaines classes d'actifs,
03:03 il y a des choses qui sont compliquées à mettre en oeuvre,
03:05 donc le label souhaite répondre le plus vite possible,
03:07 donc il y a des sous-comités, puis ça remonte même au comité s'il y a besoin de trancher, si c'est des choix politiques.
03:14 Et là-dessus il y a aussi une période de transition,
03:16 il y avait un calendrier qui a été mis en place, qui donc va s'étendre jusqu'au 1er janvier 2025,
03:21 les sociétés de gestion qui ont déjà le label ont jusqu'au 1er janvier 2025 pour s'adapter,
03:25 et donc ça va donner une période de transition,
03:28 sachant qu'à partir du 1er mars par contre,
03:30 tous ceux qui n'avaient pas le label auparavant pourront solliciter le label,
03:33 mais sous la nouvelle version uniquement,
03:35 il faudra être prêt directement au 1er mars,
03:37 avec un niveau d'ambition qui est extrêmement élevé.
03:40 Ça veut dire quoi pour l'épargnant ?
03:41 Il y a quand même deux choses qu'il faut souligner,
03:42 la première c'est qu'a priori, compte tenu du texte qu'on a aujourd'hui,
03:45 on va vers un label qui est plus ambitieux,
03:47 et donc moins de mauvaise surprise pour l'épargnant, c'était le but.
03:51 Mais il y a plusieurs études qui l'ont montré, notamment une étude de Morningstar,
03:55 peut-être moins de fonds dans lesquels investir à la fin.
03:58 Voilà, c'était un peu l'autre point que j'allais évoquer,
04:00 c'est que probablement tout le monde ne va pas passer à la marge,
04:02 comme on disait c'est extrêmement élevé,
04:04 que ce soit en termes de coûts, en termes de technicité, en termes d'ambition,
04:07 il y a des sociétés de gestion qui soit ne souhaiteront pas
04:10 continuer avec le label pour des raisons simples,
04:12 de coûts, d'évaluation du coût avantage,
04:14 ou d'autres qui diront "voilà c'est juste pas possible pour nous".
04:17 Donc ça ça va être intéressant de voir l'aspect, la réorganisation
04:19 que ça va entraîner sur les sociétés de gestion,
04:21 notamment les plus petites ou les moyennes,
04:23 on sait que c'est forcément un problème,
04:24 puisque quand on parle de moyens, ça veut dire investissement,
04:27 ça veut dire être à la hauteur des enjeux qui sont demandés,
04:31 et peut-être que tout le monde ne pourra pas suivre.
04:33 Quels sont les alternatives ?
04:34 Comment le marché va se réorganiser autour de ça ?
04:36 Je pense que c'est une période intéressante qui s'ouvre,
04:38 et qui se terminera en fin d'année, obligatoirement de toute façon.
04:41 Alors on est qu'en début d'année 2024,
04:43 donc j'imagine que vous n'avez pas tous les éléments,
04:45 mais est-ce que dans les échanges que vous pouvez avoir
04:47 avec certains fonds ou autres,
04:49 on constate que la mise aux normes face à ce nouveau label ISR
04:53 se fait sans douleur, ou au contraire,
04:56 implique de grosses réorganisations,
04:58 ou peut-être un changement même de mindset ?
05:01 Oui, je pense que c'est vraiment un changement,
05:03 ça c'est un avertissement aux sociétés de gestion,
05:04 parce que sur mes activités de conseil, on le voit,
05:06 il y en a certains qui ont déjà vécu,
05:08 ça c'est la version 3,
05:09 qui ont vécu le passage de la version 1 à la version 2,
05:11 qui disent "on l'a déjà fait une fois, on va le refaire".
05:13 Non, la version 2, la version 3, c'est pas une évolution,
05:15 c'est une révolution quasiment, on change de monde,
05:18 donc il faut être vraiment prêt,
05:19 c'est pas quelque chose qu'il faut préparer à la dernière minute.
05:21 Et oui, on a beaucoup de gens qui commencent à s'interroger sur le...
05:25 c'est plus le coût additionnel que ça va représenter,
05:28 surtout si la place ne s'organise pas,
05:30 et c'est tout l'écosystème qui doit s'organiser autour de ça,
05:32 c'est-à-dire la fourniture de données,
05:34 l'accompagnement, les analystes,
05:36 il y a tout un écosystème à mettre en place autour de ça,
05:38 qui n'est pas prêt aujourd'hui, très clairement,
05:40 donc on se demande effectivement si tout le monde va suivre,
05:43 mais il y a beaucoup de sociétés de gestion qui se retirent,
05:45 plus des classes d'actifs aussi,
05:46 qui sont plus compliquées à rentrer dans le label,
05:49 la gestion passive se pose beaucoup de questions, etc.
05:51 Donc on va voir les impacts là-dessus.
05:53 C'est vrai que vous mentionnez effectivement
05:55 que le fait que l'écosystème soit prêt,
05:57 c'est quelque chose qu'on entend souvent sur ce plateau,
05:59 qu'effectivement on a des bouts de réglementation un peu partout,
06:02 que ce soit au niveau européen, au niveau français,
06:04 au niveau des labels ou autres,
06:05 mais que la chaîne n'est pas encore totalement construite,
06:08 et ça devient presque un argument pour dire
06:11 "Attendons que la chaîne soit construite avant d'y aller,
06:14 est-ce que là il y a un risque de dire
06:16 "Bon ben je vais correspondre aux exigences du label,
06:19 mais en même temps je ne sais pas quelles seront les exigences
06:21 à terme de l'Union Européenne"
06:23 et donc d'entretenir un flou qui fait qu'on choisit
06:26 un petit peu ce qui est le plus proche de sa stratégie actuelle.
06:29 Je pense que c'est un risque,
06:31 après malheureusement il faut vivre avec ce décalage
06:34 qu'on a maintenant entre l'évolution même des différents labels européens,
06:38 parce qu'il y a des concessions d'intérêt pour plusieurs labels,
06:40 donc ça c'est compliqué,
06:41 entre l'évolution de la réglementation européenne
06:43 et de la réglementation française,
06:45 et même au niveau de la réglementation européenne,
06:47 la CSRD qui vient juste de rentrer en vigueur
06:50 et dont on a besoin pour faire des produits.
06:52 Donc on a un décalage de calendrier qui est perceptible
06:55 depuis un moment et avec lequel on doit vivre.
06:57 Alors est-ce que pour autant il ne faut pas avancer ?
06:59 Je pense que ce serait une erreur,
07:00 je pense qu'il faut qu'on avance,
07:01 il faut qu'on montre l'exemple et que les sociétés de gestion avancent
07:04 et puis malheureusement tout le monde prendra le train en marche
07:06 à un moment ou à un autre,
07:07 mais je pense que c'est indispensable.
07:08 Si on attend que tout soit en place,
07:09 si vous voulez, on va prendre trop de retard.
07:11 Je pense qu'aujourd'hui c'est vraiment le bon chemin
07:13 qui a pris le label, plus ce niveau d'exigence,
07:15 mais qui demande que tout le monde se mette autour de la table
07:18 et qu'on soit clair à la fois sur les objectifs et les enjeux.
07:21 Objectif pour la nouvelle version du label ISR,
07:24 c'est début 2025, comme vous l'avez dit tout à l'heure.
07:26 Début 2025 il y aura une rentrée en vigueur complète,
07:28 d'ici là c'est une phase de transition pour ceux qui ont déjà le label,
07:31 qui vont le redemander ou qui vont faire les audits de suivi,
07:34 donc ils seront dans une phase de transition
07:36 où on ne pourra pas leur retirer le label,
07:38 mais on soulignera un petit peu les problèmes qu'ils ont d'adaptation,
07:41 ils sont plutôt protégés jusqu'à la fin de l'année.
07:43 Par contre au premier jour de 2025, tout le monde sous la V3,
07:45 les nouveaux, les anciens, et donc là il faudra être en ordre de marche.
07:48 Et finalement ce n'est pas très long, c'est dans un an.
07:52 Merci beaucoup Kimenguyen, je rappelle que vous êtes le président de Kermit,
07:56 et quand à nous on se retrouve tout de suite dans Enjeux Patrimoines.