Révélé par la série SKAM France, le comédien poursuit sa carrière au théâtre. À 27 ans, il vient de signer un contrat d'auxiliaire à la Comédie-Française
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00:00J'étais tellement en train de nager entre le réel et le rêve que j'ai oublié sur mon Vélib, mon contrat.
00:07Et je ne m'en suis même pas rendu compte.
00:09Et c'est une dame, trois jours plus tard, qui m'a dit sur Instagram,
00:11« Je crois que vous avez oublié votre contrat de la Comédie Française. »
00:13Il faut que je regarde l'extrait.
00:15Parce que j'ai vu la voix, je me suis dit « Oula, je n'avais pas mué à l'époque. »
00:17« Vous vous demandez sûrement pourquoi la batterie plutôt qu'un autre instrument. »
00:21« Eh ben, je ne sais pas. »
00:23J'avais 19 ans, j'étais vraiment en plein dans la période des premières fois.
00:26Et ce texte est arrivé et j'avais l'impression que ça parlait de...
00:32J'avais un peu une lecture hérotomane de la pièce peut-être,
00:34mais j'avais l'impression que ça parlait de moi
00:35et que c'était un vrai refus dans lequel j'allais pouvoir mettre plein de mes émotions.
00:39Et en plus, c'est justement un personnage qui raconte comment est-ce qu'il a grandi
00:42à travers le prisme de la batterie.
00:44Et ça a été beaucoup mon cas.
00:46Et je vivais en parallèle plein de premières fois.
00:48Et donc, il y avait vraiment ce côté refus.
00:49C'est-à-dire que tous les soirs, le théâtre a été pour moi un exutoire incroyable au collège.
00:56Et j'avais l'impression de revivre la même chose en plus fort.
00:59C'est la période où il y avait vraiment... J'avais beaucoup de vertiges.
01:03J'ai l'impression que ça y est, les premiers pas, c'était des...
01:06Il y avait un enjeu dans les premiers pas, comme si ça définissait vraiment qui j'étais.
01:10Et j'avais tellement peur parce que je ne savais pas qui j'étais.
01:13Et je trouvais ça incroyable parce que ce personnage-là me permettait de grandir à ses côtés
01:16et de mettre tout ça chaque soir dans ce personnage d'Adrien.
01:22Et aussi parce que j'ai découvert à quel point, je crois, la santé mentale était importante.
01:26Notamment quand on joue au théâtre.
01:28Parce qu'en fait, je me retrouvais seul face à 400 personnes chaque soir.
01:32Et ça a duré un an et une semaine sans s'arrêter.
01:34Donc c'était assez fou.
01:36Mais je ne savais tellement pas qui j'étais que de me retrouver seul face à 400 personnes
01:39alors que je ne savais pas être seul face à moi-même, c'était abyssal.
01:42Et j'étais assez pétri d'angoisse.
01:46À l'époque, je vomissais chaque soir avant de monter sur scène.
01:48Et j'ai compris comment est-ce que...
01:50Voilà, c'était les débuts des crises d'angoisse aussi où je ne savais pas ce que c'était.
01:53Et j'ai l'impression que mon corps était défaillant avant de voir que mon corps avait peur,
01:57on m'aurait des signaux et qu'il fallait prendre soin de sa santé mentale.
02:00Et donc ça a été un long chemin.
02:01Mais j'ai vécu tout ça avec cette pièce.
02:03Donc c'est une pièce très importante, j'ai l'impression.
02:06Et j'y suis très attaché.
02:09Vous ne pouvez pas être fait.
02:12Peu importe vos péchés.
02:17Dieu vous comprend.
02:19Et vous accepte.
02:22Ça, c'est...
02:24Je crois à la série qui a changé ma vie.
02:29Et qu'elle soit personnelle ou professionnelle,
02:32et ça a été un pivot incroyable.
02:35Ça m'a permis de devenir beaucoup moins bête aussi.
02:39Parce que...
02:40On a tout à coup eu la chance d'avoir une communauté de gens qui regardaient la série
02:47et qui partageaient leurs expériences.
02:50Et j'ai senti que j'étais moins seul aussi dans les questionnements d'identité pluriels que j'avais.
02:55Et que c'était OK de ne pas savoir.
02:56C'était OK de ne pas se définir.
02:58En tant que jeune, c'est ce que je parlais tout à cœur, tout à l'heure, ce vertige-là de la construction.
03:02Et je crois que je le vivais en parallèle de mon personnage.
03:06Et au-delà de ça, ça a été une rencontre incroyable,
03:08notamment avec David Ourek, qui est le réalisateur, qui est un chef de troupe incroyable.
03:12Et aussi Maxence Dané-Fauvel, qui joue Elliot, mon partenaire.
03:16C'est génial.
03:17Avec Maxence, on a été un peu en figure de proue de la chose.
03:20On était dans la lumière, etc.
03:21Mais derrière, il y avait le scénario qui était incroyable.
03:23Toute l'équipe était portée vraiment par l'enjeu commun.
03:25Et je crois qu'on avait à l'époque pas assez de représentations
03:28qui abordent la sexualité comme une chose très universelle.
03:33Et avec David Ourek, on s'était dit
03:34« Non, on ne veut pas voir deux hommes, on veut voir deux êtres qui s'aiment. »
03:38Et vraiment se mettre tout le temps du côté de l'amour.
03:40Ça paraît un peu démago ce que je dis, mais il y avait vraiment ce truc-là.
03:44Et puis on s'était dit « Si jamais on aide un Lucas, on aura tout gagné. »
03:47Je pense que...
03:48Et je me souviendrai toute ma vie de la première fois
03:50où on a reçu un message de quelqu'un qui disait que
03:52après avoir gueulé jusqu'à, il s'était senti OK avec le faire de faire son coming out.
03:59Et on avait pleuré tous les trois avec Maxence et David.
04:08Quand j'ai commencé à jouer et avoir ce travail-là de troupe, j'étais en mode
04:28« Mais pourquoi on ne m'a pas dit avant ? »
04:31J'ai grandi justement avec cet esprit de troupe.
04:35Mais je crois qu'après « Une vie sur mesure », j'ai fait un autre seul en scène,
04:38« Les milliers de vies des urgences » adapté du roman de Baptiste Beaulieu.
04:42Et en fait, je crois que ça arrivait au bon moment.
04:46J'avais envie de jouer avec du monde, j'avais envie de jouer avec des gens.
04:49Alors après, quand tu es seul en scène, il y a un vrai partenaire qui est le public.
04:52Mais sur scène, ça m'a amené à autre chose, à autre part.
04:56Et puis aussi parce que Guillaume de Tonquedec, Marc Fayet, Camille Aguilar, mes partenaires,
05:02avaient cet esprit de troupe, Guillaume et Marc notamment.
05:05Et je suis très touché par ce côté un peu maillon de la chaîne dans le théâtre.
05:09J'ai vraiment l'impression que c'est une culture et que si elle ne se transmet pas
05:12comme toutes les cultures, elle meurt.
05:14Et Guillaume et Marc et José, on passait des soirées où ils nous racontaient des anecdotes de théâtre,
05:19que ce soit Jean Marais, que ce soit des anecdotes qu'on leur racontait sur Michel Bouquet
05:23qui avait été le professeur de Guillaume de Tonquedec.
05:25Il y avait vraiment ce côté transmission.
05:27Et aussi, ça c'était assez incroyable.
05:30Guillaume de Tonquedec est un partenaire fou, mais incroyable.
05:36C'est vraiment quelqu'un qui voit la jeunesse comme une opportunité d'échange, de partage.
05:42Il y avait vraiment un truc où il disait « mais vous avez autant à m'apporter que moi ».
05:46Il y avait vraiment ce truc, mais totalement bienveillant et dénué de tout intérêt,
05:50de nous, nous mettre, j'allais dire, en avant,
05:52mais vraiment de pousser la jeunesse qui va vers le théâtre.
05:56Et je crois qu'il est très habité aussi par le fait que les jeunes reviennent dans les salles.
05:59Et on s'entendait très très bien sur ce point.
06:01Un des plus beaux jours de ma vie.
06:04C'est mon rêve d'enfant.
06:08On faisait des balades le dimanche avec mon père,
06:11on passait dans la comédie française et on regardait comme ça.
06:13Parce que c'est l'absolu de la troupe.
06:14C'est-à-dire, c'est justement un théâtre de troupe dans ce côté-là où ça joue tout le temps.
06:24L'un peut se retrouver à faire un pas.
06:26J'ai vu le lendemain avoir un rôle principal dans une pièce, voire même faire les deux.
06:29Et puis, il y a un côté très malléable de l'acteur
06:33et qui vient aussi par la répétition et par le fait de jouer tout le temps.
06:37Et puis, parce que tous les trois mois, il y a une nouvelle création.
06:39Et puis, parce que c'est quand même un vivier incroyable.
06:41Mais au-delà de ça, c'est un des derniers endroits qui protègent le répertoire.
06:45Moi, j'ai rencontré le théâtre grâce à M. Perrin,
06:49qui, à l'époque, je me faisais harceler.
06:51Bon, ça, il ne le savait pas, mais avait eu la bonne idée de nous faire jouer
06:54pour nous prendre par la main.
06:57Et au lieu de lire le théâtre, il nous les faisait jouer en cours de français.
07:02Et tout à coup, en fait, ce qui était incroyable,
07:04c'est que je comprenais que les rires de mes camarades,
07:06ce n'était pas les mêmes que dans la cour de récré
07:07et qu'on était obligé de croire à une histoire commune.
07:10On était obligé de jouer ensemble.
07:13Et bien au-delà de toutes les divergences de cour de récré.
07:15Et ça, c'était assez fou.
07:16Et c'était Georges Dantin de Molière.
07:19Et en fait, il était passionné.
07:21Donc, il était passionnant parce qu'en fait,
07:23il arrivait à tirer les enjeux de cette langue
07:25qui était quand même, j'allais dire, moins accessible
07:27que la langue contemporaine parce que c'est une autre langue.
07:30Mais il arrivait à tirer ces enjeux-là et à nous faire aimer les mots.
07:33Et c'est incroyable.
07:34La comédie française, c'est un des derniers endroits
07:35où justement, c'est la gardienne de ça.
07:38Et donc, en-delà, c'est la gardienne de mon rêve d'enfant,
07:40de la même manière que le théâtre m'a permis,
07:42adolescents, de me rencontrer
07:45et d'avoir un refus dans lequel je me sentais vraiment libre de grandir.
07:49Après, je rentre en comédien auxiliaire.
07:50Donc, si ça se trouve, ça s'arrêtera en mai.
07:52Mais c'est fou.
07:55J'en ai tellement rêvé.
07:57Et là, tu le vis.
07:58J'étais tellement...
07:59J'étais tellement...
08:00Mais dans ma...
08:01J'avais l'impression de flotter entre le rêve et le réel
08:05que je suis rentré de cette journée
08:07où Eric nous a fait en plus une visite guidée des coulisses.
08:13Et il est là, il te raconte tellement d'anecdotes.
08:15Tu te dis, c'est lunaire.
08:16Moi, je payais des...
08:17Quand j'étais élève comédien,
08:19je payais des Coca Zero au Nemours.
08:21Et il était à côté et je faisais...
08:22C'est Eric Ruff à côté.
08:24Et là, c'est toi qui es à côté.
08:26C'est fou.
08:27C'est fou.
08:28C'est fou.
08:29C'est fou.
08:29C'est trop bizarre.
08:29C'est fou.
08:30J'ai tellement rêvé.
08:31J'ai tellement pleuré.
08:32J'ai tellement...
08:32Mais c'est fou dans cette salle.
08:34C'est incroyable.
08:36Tu as l'enfant qui fait, mais attends, qu'est-ce qui se passe ?
08:37C'est pas...
08:38J'étais tellement en train de nager entre le réel et le rêve
08:42que j'ai oublié sur mon Vélib, mon contrat.
08:46Et je ne m'en suis même pas rendu compte.
08:47Et c'est une dame, trois jours plus tard, qui m'a dit,
08:49je crois que sur Instagram,
08:50je crois que vous avez oublié votre contrat de la comédie française.
08:54Voilà.
08:54Et j'ai été récupéré.
08:55Sinon, je ne me serais même pas rendu compte.
08:58Sinon, pas de comédie française.
08:59Sinon, pas de comédie française.
09:01Too bad.
09:02Too bad.
09:02Sinon, pas de comédie française.