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00:00En ce moment, l'économie est au cœur des préoccupations du gouvernement français.
00:06Entre la guerre commerciale lancée par Donald Trump contre le reste du monde
00:09et les finances publiques qui ne sont pas bonnes, il y a des raisons d'être inquiets.
00:13Le Premier ministre François Bayrou a convoqué mardi une conférence
00:17afin, dit-il, de sensibiliser les Français aux pathologies budgétaires de leur pays.
00:22On va en parler avec vous, Rémi Bourgeau, bonsoir.
00:25Vous êtes économiste, chercheur associé à l'IRIS.
00:28Alors aujourd'hui déjà, le ministre de l'économie, Éric Lombard, a commencé à préparer les Français.
00:34La France va devoir réaliser un effort. On va l'écouter.
00:38Je maintiens le 4,6% pour 2026 qui va demander un effort supplémentaire de 40 milliards d'euros.
00:45Et pourquoi est-ce que nous considérons qu'il y a urgence ?
00:48Parce que ces déficits accumulés ont produit une dette qui fait plus de 3 000 milliards d'euros
00:53et nous devons chaque année verser à nos créanciers, aux personnes qui nous prêtent, des sommes croissantes.
00:58On est bien en état d'urgence budgétaire.
01:00Cette année, l'année dernière, plus de 50 milliards d'euros verser à nos créanciers.
01:02Cette année, près de 70 milliards d'euros.
01:05Bon, en gros, l'heure est grave, très grave.
01:07C'est ce qu'on est en train d'essayer de nous faire comprendre.
01:09Oui, l'étau s'est resserré sur le budget français, sur la dette française ces derniers mois, déjà avec le dérapage du déficit.
01:17Et c'est quand même ces annonces qui se sont succédées, créant la surprise et créant une certaine anxiété sur les marchés financiers.
01:27Et dans un contexte plutôt de hausse des taux et à l'échelle européenne, des changements en Allemagne qui avaient une politique très restrictive sur le plan de la dépense publique
01:40et qui, là, avec le nouveau chancelier, va engager un plan de dépense important, voire très important, ce qui fait que les taux allemands montent et ce qui a un impact, du coup, aussi sur les taux français.
01:51Donc, on est vraiment pris à la croisée de deux choses, avec une augmentation des taux européens et mondiaux, on pourrait dire, en tout cas dans les pays développés,
02:01et cette situation du budget français, avec le dérapage hérité de beaucoup de choses, mais notamment du quoi qu'il en coûte, du Covid.
02:12Donc, cette conférence organisée par François Bayrou mardi, conférence sur les finances publiques, en vrai, elle n'a rien à voir avec ce qui se passe par ailleurs.
02:21Cette guerre commerciale menée par Donald Trump s'est complètement décorrélée et la situation budgétaire de la France n'est pas liée à ce qui se passe en ce moment.
02:29C'est un peu le problème, justement, on a tendance à voir simplement l'aspect budgétaire sans la relier au problème économique,
02:34qui est en fait beaucoup plus important, avec la question véritablement du modèle de croissance.
02:40D'autres pays ont une dette très élevée, un déficit aussi élevé, alors c'est toujours problématique,
02:45mais si les choses avancent, si le pays prend le devant sur le plan industriel et technologique, c'est moins grave.
02:53Et il faut se rappeler la crise de l'euro, quand même, dont on sort quelque part, dont on hérite des conséquences.
03:00On a tous ces pays qui avaient plongé à l'époque, surtout parce qu'ils avaient des déficits commerciaux,
03:06des déficits extérieurs en général extrêmement importants, qui les rendaient tout aussi vulnérables.
03:12Et au final, ça s'appliquait, ça se répercutait sur la dette, sur les marchés, dans un contexte très tendu.
03:19Mais les crises de dette n'arrivent pas simplement comme ça, du fait de chiffres, de barèmes appliqués à la dette.
03:27Le problème est essentiellement de nature économique.
03:30Aujourd'hui, on ne peut pas simplement relancer la machine à la dépense publique, la pression des marchés.
03:36Et là, pour autant, on ne peut pas s'imiter simplement à une vision budgétaire et fiscale.
03:40En tous les cas, il faut trouver 40 milliards d'euros d'économies, c'est ce qu'a dit Eric Colombard.
03:45On les trouve où ?
03:47Alors, ce qui se dessine un peu, c'est sur les hauts revenus, mais encore, il faut voir dans quelle mesure.
03:52Et on a une stratégie qui consiste, comme d'habitude, à regarder un petit peu partout,
03:57là où ça va moins faire parler, pas forcément faire moins mal, notamment dans la recherche.
04:02On a vu des choses assez étonnantes, des mécanismes qui permettent de financer l'innovation,
04:08des startups, des jeunes chercheurs, des jeunes docteurs.
04:12Et voilà, on prend un petit peu partout comme ça, il y a ces petits coups de rabot qui s'accumulent un peu partout,
04:17mais sans vision générale pour vraiment créer de la croissance et ancrer la France dans un renouveau industriel.
04:25On se souvient qu'il y a quelques années, on parlait sans arrêt de réindustrialisation.
04:28On a dit ça y est, elle est arrivée de façon un peu divine.
04:33Et en fait, ce n'est pas vraiment ce qui s'est passé.
04:36Et aujourd'hui, on est focalisé simplement sur ces questions.
04:40Et voilà, il y a un léger consensus sur plutôt les hauts revenus.
04:45Et ensuite, cette stratégie assez généralisée de petits coups de rabot.
04:49Cette réindustrialisation, on va en parler puisqu'en ce moment, il y a un grand chamboulement au niveau planétaire
04:56avec cette augmentation des droits de douane voulue par Donald Trump.
05:00La France et l'Europe ont obtenu un sursis de 90 jours.
05:04Cette pause représente, selon Emmanuel Macron, 90 jours d'incertitude pour toutes nos entreprises.
05:08C'est ce qu'il a déclaré sur X.
05:10Il promet de mobiliser tous les leviers pour protéger.
05:15Un mot protéger qu'il emploie à deux reprises.
05:18Est-ce qu'on est en passe d'entrer dans une nouvelle ère, celle où le libre-échange tel qu'on l'a connu n'a plus sa place ?
05:25Oui, on est clairement, en fait, depuis des années, depuis 2008, en réalité, dans un changement d'époque
05:31où la question, ce n'est plus simplement de libéraliser les échanges commerciaux,
05:36mais de devenir plus autonome et d'être à la pointe autant que possible dans les technologies émergentes.
05:43C'est cette compétition entre la Chine et les États-Unis, en particulier dans l'IA,
05:49tout ce qui relève du numérique parmi d'autres sujets.
05:53L'Europe a du mal, elle est en panne.
05:55Elle s'est focalisée sur des questions plus macroéconomiques, du coût du travail notamment.
06:01Mais l'heure est vraiment à l'autonomie stratégique et industrielle.
06:05Et c'est aussi l'objet de cette grande confrontation sino-américaine.
06:12Donc on a véritablement basculé dans une nouvelle époque, au-delà de la personnalité de Trump et de ses frasques commerciales.
06:20Pour l'instant, l'Europe réserve sa riposte face à l'offensive trumpienne.
06:28Est-ce qu'elle ne peut agir que sur les droits de douane ?
06:31Alors le problème, oui, c'est qu'on a tendance à se focaliser sur la réponse.
06:35Voilà, les Américains taxent le cognac, on taxe le whisky, etc.
06:41Donc ça, c'est sur le court terme, les réponses au jour le jour.
06:46Mais l'enjeu véritable, c'est le rééquilibrage commercial.
06:49Alors l'Europe a un fort excédent commercial sur les États-Unis.
06:54C'est en particulier le fait de l'Allemagne, de nombreux secteurs, en particulier dans l'automobile.
07:00Mais par ailleurs, l'Europe est extrêmement dépendante et de façon problématique des États-Unis,
07:05dans le numérique, dans l'armement et dans l'énergie.
07:09Et ce que souhaite Trump et ce qu'il exige fermement, c'est qu'on aggrave en fait cette dépendance dans ces secteurs
07:16qui sont pour les Européens extrêmement stratégiques pour se repositionner dans la course mondiale,
07:23plutôt que d'avoir un ajustement, par exemple, sur l'excédent allemand.
07:29Et ça, ça peut se faire, par exemple, quand les entreprises concernées ouvrent des sites industriels aux États-Unis,
07:34ce qu'elles ont déjà fait dans une large mesure, alors sous la menace de droits de douane
07:38ou par l'attrait de subventions, comme le plan prétendument de réduction de l'inflation,
07:45mais qui encourageait la production sur le territoire américain.
07:48Donc aujourd'hui, ce qu'on entend plus des dirigeants européens,
07:53pas forcément à Paris, mais plus à Bruxelles et ailleurs,
07:56c'est l'idée de céder en achetant plus américains.
07:59Donc une négociation est possible, elle est encore possible.
08:01Alors le problème, c'est qu'on va plus dans le sens vraiment d'une...
08:05Alors capitalisation, c'est peut-être un peu fort, mais vraiment d'une acceptation de termes
08:09qui vont vraiment pénaliser notre croissance et notre positionnement industriel et technologique dans la durée.
08:17On le voit dans le secteur de la défense.
08:20On a des divergences très nettes entre pays européens, avec des annonces d'achat de F-35.
08:25Alors qu'on disait que l'idée, c'était d'acheter européens dans ce secteur.
08:31Et quelques semaines plus tard, le son de cloche est assez différent.
08:35On entend un son un peu inquiétant des dirigeants européens de ce point de vue-là.
08:41Donc l'Europe se met plutôt dans une situation de faiblesse,
08:44parce qu'elle ne pose pas bien les termes en offrant des concessions là où ce serait raisonnable
08:49pour équilibrer les excédents commerciaux européens et en particulier allemands.
08:55Merci beaucoup Rémi Bourgeau d'être venu nous faire un petit point sur la situation économique de la France.
09:02Restez avec nous. Tout de suite vous retrouvez Fatima Tawane pour le Journal de l'Afrique.
09:05Merci.