100% Sénat diffuse et décrypte les moments forts de l'examen des textes dans l'Hémicycle, ainsi que des auditions d'experts et de personnalités politiques entendues par les commissions du Sénat.
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00:00 [Générique]
00:10 Bonjour à tous et bienvenue dans cette nouvelle édition 100% Sénat.
00:14 Le Sénat qui a lancé une mission sur la périnatalité,
00:17 c'est-à-dire la grossesse, et les premiers jours après la naissance des enfants.
00:20 Les sénatrices et sénateurs qui s'interrogent sur la façon dont s'informent les parents
00:24 au moment d'accueillir un nouveau-né.
00:26 Avec une audition très forte cette semaine, notamment avec le témoignage d'Anna Roy.
00:31 Elle est sage-femme, chroniqueuse dans la maison des maternelles,
00:34 et elle a dénoncé au Sénat le manque de moyens dans les maternités.
00:38 On écoute les moments forts de cette audition, sélectionnée pour public Sénat par Mathilde Nuttarelli.
00:43 Je m'appelle Anna Roy, je suis sage-femme depuis une quinzaine d'années.
00:46 J'ai été longtemps à l'hôpital, j'ai démissionné de l'hôpital il y a deux ans,
00:49 et maintenant je suis dans une activité libérale dans le centre de Paris.
00:52 Je suis chroniqueuse télé depuis huit ans, à la maison des maternelles,
00:56 qui est une émission qui est diffusée sur France 2 tous les matins.
00:59 Je suis l'auteur d'une quinzaine de livres grand public autour des questions de santé et de périnatalité.
01:05 Je suis aussi l'autrice de deux podcasts, un produit par Europe 1 et un produit par Slate,
01:09 qui concernent aussi la santé des femmes.
01:12 Et après j'ai plein d'autres activités, d'enseignement en particulier,
01:15 et j'ai donc un compte Instagram aussi où il y a 246 000 abonnés.
01:18 Mais je vous le dirai pourquoi, ce n'est pas mon principal intérêt.
01:23 Moi je voudrais rappeler, et ça me semble vraiment très important,
01:26 à quel point l'information, la vulgarisation médico-scientifique est importante,
01:29 à quel point c'est un enjeu de santé publique,
01:31 et presque, ça ne me paraît pas assez pris en compte par les pouvoirs publics.
01:34 En fait, je pense que ça peut vraiment permettre de réduire la morbidité périnatale
01:39 de façon très très importante, si elle est bien faite.
01:43 Et c'est tout l'enjeu je pense d'aujourd'hui, c'est de déterminer ce que c'est qu'une information bien faite.
01:47 Pourquoi ? Pour plusieurs volets, et je le vois tous les jours dans ma pratique clinique,
01:50 c'est que ça incite les femmes à consulter, alors qu'elles ne s'auraient pas consultées.
01:55 Ça permet la détection précoce, ça promeut les dépistages et la vaccination,
01:59 et il y a un mouvement qui est vraiment difficile en ce moment sur les vaccinations.
02:04 Il y a une réduction des comportements à risque,
02:06 la promotion de la salute autogénale et des meilleurs,
02:09 mais en tout cas ce qui est sûr, c'est que c'est vraiment important d'avoir une information bien faite.
02:13 Et la deuxième chose que je voudrais dire, c'est que de toute façon,
02:15 c'est une obligation déontologique et même au-delà de déontologique de la part des professionnels de la santé.
02:19 Dans le Code de la santé publique, il y a écrit qu'il faut encourager nos patientes et nos patients
02:24 au libre choix concernant les praticiens, les établissements de santé et les thérapeutiques.
02:28 Et donc il faut absolument que les patients soient eux-mêmes leurs propres médecins.
02:32 Et donc c'est un devoir des professionnels de la santé, ce qu'on fait tous les jours.
02:36 Mais plutôt que de continuer là-dessus, je voudrais vous donner trois exemples
02:38 qui me paraissent assez criants et qui disent à quel point ça peut être important.
02:42 Le premier, c'est une patiente qui s'appelle Amira, qui a 32 ans, qui est enceinte de son premier enfant.
02:46 Elle est enceinte de huit mois et elle allume la maison des maternelles.
02:50 Et ça fait 15 jours qu'elle se gratte sur tout le corps.
02:52 Et puis elle tombe sur mon tutoriel où je dis que ça peut être le signe d'une maladie hépatique
02:56 qui s'appelle la cholestase gravidique.
02:59 Elle se rend aux urgences, il pose le rythme cardiaque fétal, césarienne en urgence,
03:03 cet enfant est rattrapé par un cheveu, il n'extrémise.
03:05 Donc voilà comment ça peut... mais des exemples de ça, je l'ai des milliers.
03:09 Je voudrais aussi vous parler de Sophie. Sophie, c'est une patiente qui est traitée depuis deux mois
03:12 pour une dépression du postpartum sévère en ambulatoire.
03:15 Et un matin, elle se sent hyper bien parce qu'elle a pris la décision de mettre fin à ses jours.
03:19 Et donc elle va vers un pont et elle se dit "Ah, je vais pouvoir sauter et être libérée de cette souffrance".
03:23 Et puis au dernier moment, elle me dit "Mais j'entends la voix, votre voix Anna qui dit
03:27 en fait quand on a envie de mourir, on va aux urgences".
03:29 Et pareil, elle va aux urgences, elle sera internée et elle ne mourra pas.
03:33 Et enfin, je voudrais parler d'Hugo, d'un petit garçon de huit ans.
03:35 Sa mère lui a acheté un livre qui s'appelle "Tout sur les Z et les Zizi" que j'ai écrit,
03:39 que sa mère laisse traîner et il le lit.
03:41 Et il va dire à sa maman "Bah écoute, moi, mon prof de tennis, ça fait trois ans, trois mois
03:46 que je subis des attouchements réguliers à chaque fois que je joue au tennis".
03:49 Bref, tout ça pour vous dire, des exemples comme ça, j'en ai des milliers,
03:52 que cette information pour moi a beaucoup de sens.
03:54 Alors évidemment, c'est l'essence de ma vie, de cette fonction que je me suis mise,
03:57 mais elle a en tout cas beaucoup d'importance pour moi.
03:59 Pardon, je suis désolée pour le micro, je parle trop près.
04:02 Mais en tout cas, ça va ?
04:05 Et donc voilà, des exemples comme ça, évidemment, ça me tient à cœur
04:08 et je me dis que les pouvoirs publics ont quelque chose à faire sur cette information.
04:11 Donc j'aimerais bien que ça dépouche là-dessus.
04:14 Bonjour, alors moi je m'appelle Renée Grozart, je suis journaliste au Nouvelle-Hobbes
04:20 et j'ai écrit des livres.
04:23 Qu'est-ce qu'une bonne information ?
04:25 Je crois que si je suis ici, c'est parce que justement j'ai écrit ces livres
04:28 et des articles sur la parentalité et plus précisément sur la maternité.
04:31 Mais si je l'ai fait, c'est précisément parce que j'avais moi-même manqué d'informations
04:35 et que cela s'est même avéré douloureux.
04:38 Je vous parle donc aujourd'hui en tant que journaliste, certes, essayiste,
04:42 mais il est important pour moi de situer que cette parole est aussi celle d'une mère,
04:45 une mère qui a fait une dépression du postpartum en 2015
04:48 et qu'il y a donc quelque chose de forcément émouvant à être ici devant vous.
04:51 Au sujet de la grossesse, quand en 2015 j'ai écrit "Enceinte, tout est possible",
04:55 mon premier livre qui explorait les injonctions faites aux femmes pendant cette période,
04:58 ce qui m'avait frappé, c'est combien on les infantilisait.
05:01 Dans ce livre, j'ai essayé d'offrir des informations détaillées.
05:03 Mon propos n'a jamais été de dire aux personnes enceintes "faites n'importe quoi et amusez-vous bien",
05:07 mais plutôt "voici les informations dont on dispose actuellement
05:10 et voici les risques que présentent telle ou telle pratique".
05:13 Parce que les grossesses sont devenues sur-médicalisées,
05:16 on culpabilise les femmes et beaucoup dès qu'elles s'octroient une liberté
05:19 hors de nombreuses recommandations en vigueur.
05:21 Mais les êtres humains ne sont pas des robots
05:23 et ce qui transpire in fine dans cette rigidité est un message à mon sens terrible.
05:27 C'est un message qui dit "les femmes sont de mauvaise mère dès la grossesse".
05:31 C'est pourquoi je crois que le sujet qui vous préoccupe aujourd'hui
05:34 est un sujet profondément politique, éthique, philosophique.
05:38 Quand j'ai interviewé le médecin féministe Martin Winclair
05:40 et que je lui ai parlé du sentiment de transgression que je ressentais
05:43 quand je commettais une incartade aux nombreuses recommandations en vigueur,
05:46 il avait tiqué.
05:48 Pour lui, ce mot précis, transgression,
05:51 était symptomatique d'un rapport patient-médecin dysfonctionnel.
05:54 Je le cite.
05:55 "On est dans la transgression que si l'on pense que la parole médicale est sacrée.
05:59 En tant que médecin, on est censé regarder les études, transmettre les informations
06:03 et une fois qu'on les a données,
06:05 parce que la femme enceinte connaît les risques, on ne l'embête plus.
06:07 Pourquoi ? Parce que c'est une adulte, pas un enfant.
06:10 En ce qui concerne la grossesse, il me semble qu'une information sanitaire de qualité
06:13 respecte donc les femmes et leur intelligence.
06:15 Je suis personnellement convaincue que les infantilisés ne mènent à rien de bon
06:19 et que c'est en réalité contre-productif.
06:21 Certains pays et voisins l'ont compris et n'adoptent d'ailleurs pas du tout
06:24 le même ton rigide envers les futures mères.
06:26 Je suis convaincue aussi, trop d'interdits amènent fatalement à ne pas pouvoir les suivre.
06:30 Une bonne information est donc pour moi une information détaillée et nuancée.
06:34 J'en viens maintenant à la suite de ce qui se passe après un accouchement.
06:37 Dans mon second livre, "Choisir d'être mère", je raconte tout ce que j'aurais aimé
06:40 qu'on me dise sur la parentalité avant de devenir mère.
06:43 Je vous le dis comme je le pense, je suis très heureuse de l'avoir écrit ce livre.
06:46 C'est une bonne expérience, mais il n'aurait jamais dû exister.
06:49 Les informations que j'y donne sur le manque de sommeil, ses conséquences,
06:52 le couple qui vacille à l'arrivée d'un enfant, les phobies d'impulsion,
06:55 l'ennui mortel que l'on peut ressentir au parc, c'est très important d'en parler.
06:58 Tout cela pour moi devrait être raconté à tous les futurs parents,
07:01 pas seulement à celles et ceux qui ont eu vent d'un livre ou d'un bon compte Instagram
07:05 comme celui d'Anna Roy.
07:07 Une bonne information se partage au plus grand nombre.
07:10 En 2017, j'avais interviewé Yvonne Knibillère, une historienne fabuleuse.
07:14 Elle avait 95 ans et son cerveau était en ébullition.
07:17 Elle m'avait dit "si nous avons laissé nos filles croire que la maternité est un lieu de délice,
07:21 c'est nous qui avons eu tort, nous les avons mal élevées".
07:24 Et voici ce qu'elle proposait pour sortir des fantasmes de la parentalité.
07:27 Une formation, je me permets de la citer.
07:29 Cette formation pourrait commencer au moment où un couple a le désir d'enfanter.
07:33 Il devrait alors recevoir un certain nombre d'informations.
07:35 D'abord pendant la grossesse, avec des informations qui concerneraient
07:38 surtout le développement du foetus et l'accouchement.
07:40 Le départ et le retour au travail pourraient être plus progressifs,
07:42 de manière à ce que la femme ne soit pas coupée brutalement de son environnement.
07:45 Il me semble aussi que le jeune couple qui vient d'avoir un enfant
07:48 devrait être directement affecté à une crèche et qu'il pourrait,
07:51 sur ce temps de formation, y avoir une obligation d'y aller un jour ou deux par semaine.
07:55 Ou encore deux demi-journées, travailler bénévolement pour voir ce qu'est un bébé,
07:59 quels sont les problèmes qui se posent, les maladies auxquelles on doit faire face.
08:02 Cette idée de travail bénévole permettrait aussi de faire baisser le prix de la crèche.
08:06 Alors évidemment, cette idée peut faire débat, mais je la trouve intéressante.
08:09 Car si nous sommes tous et toutes des parents différemment,
08:12 nous avons aussi toutes et toutes appris à le devenir.
08:15 De la même manière que ce qui manque, je crois, cruellement aux parents, c'est le fameux village.
08:19 Il faut tout un village pour y élever un enfant, c'est devenu impensif.
08:22 Mais c'est vrai.
08:23 Une part du mal-être des parents d'aujourd'hui vient du fait qu'ils sont très isolés.
08:26 Quand on est toute la journée seul, avec un bébé qui pleure,
08:29 sans venir à manger, à se doucher, en dette de sommeil, il y a de quoi sombrer.
08:33 C'est pour ma part comme ça que je me suis mise à pleurer tous les jours,
08:36 quand je me suis retrouvée toute seule après la reprise du travail du père de mon premier fils.
08:40 Ce qu'il faut, c'est donc recréer des solidarités et que les informations circulent aussi entre pères.
08:44 Cela pourrait aussi s'organiser dès la maternité,
08:46 ne serait-ce qu'en créant des convivialités, des groupes WhatsApp entre les personnes qui accouchent en même temps.
08:50 Une bonne information existe en dehors des livres et des institutions.
08:54 Elle se transmet entre pères.
08:56 Une information bonne, enfin, s'adresse à toutes et à tous.
09:00 C'est pourquoi elle me semble prendre en compte, et sans jugement,
09:02 toutes les spécificités, le handicap, les couples homoparentaux, les parents trans, etc.
09:06 J'espère que cette mission permettra à toutes et tous de se sentir mieux, car l'enjeu est grand.
09:10 Nous ne parlons pas que de mères, de pères et d'enfants, de leur bien-être, et donc des adultes merveilleux.
09:14 Nous parlons de nos enfants, et donc des adultes merveilleux, que nous aimerions qu'ils deviennent.
09:18 Bonjour, je m'appelle Zoé Varié, je travaille à France Inter,
09:30 et je suis productrice de deux podcasts.
09:33 Un premier qui s'appelle In utero, et un deuxième qui vient de sortir, qui s'appelle Naître.
09:38 Le premier podcast s'intéresse évidemment à la vie intra-utérine, et le deuxième à la naissance.
09:45 Alors, je suis un peu à côté, certainement, de vos questionnements ici,
09:51 puisque mes podcasts ne sont pas spécifiquement pour les femmes enceintes.
09:57 C'est un podcast grand public, qui essaie d'être savant et accessible à tous.
10:04 Donc, déjà, je me porte un petit peu, je suis un petit peu, je fais un pas de côté par rapport à ce qui a été dit avant.
10:12 Dans In utero, je me suis interrogée sur l'origine de la vie,
10:16 et je me suis attachée à rencontrer les plus grands chercheurs scientifiques du moment, français,
10:22 qui travaillent sur la biologie du développement et l'embryon, et le fœtus.
10:28 J'ai rencontré des gens extraordinaires, qui avaient une grande envie de partager au plus grand nombre ce qu'ils savaient,
10:35 et je pense que la vulgarisation est très importante.
10:38 La vulgarisation scientifique, c'est un enjeu de santé publique, mais c'est aussi un enjeu de culture,
10:43 de culture générale, et pas seulement de culture scientifique.
10:47 Alors, je ne sais pas si je dois préciser tout ce que j'ai fait, et tous les scientifiques que j'ai rencontrés,
10:54 et sur quels thèmes particuliers nous avons parlé.
10:57 Mais toute une partie du podcast, dans In utero comme dans Naître, la première partie du podcast,
11:02 j'ai interrogé des chercheurs sciences dures.
11:05 Donc, je suis dans la biologie du développement, je suis dans des choses comme ça difficiles.
11:09 Je tiens à dire que moi-même, je ne suis pas scientifique du tout.
11:12 J'ai une formation littéraire, donc je ne comprenais rien.
11:17 Donc, ils ont été obligés de m'expliquer, et c'est parce qu'ils ont été obligés de m'expliquer que je n'ai plus moi aussi réexpliquer.
11:23 Et ça, ça me semble très important, c'est-à-dire que c'est possible de comprendre,
11:27 et c'est possible de comprendre ce qu'on sait aujourd'hui.
11:30 On sait des choses fabuleuses.
11:31 J'ai été émerveillée par ce que j'ai découvert de la vie intra-utérine,
11:36 comme de ce que j'ai découvert autour de ce qu'on ne savait toujours pas sur la naissance,
11:41 parce qu'il y a encore des tas de choses qu'on ne sait pas.
11:43 Et entre autres, j'ai rencontré une femme, une chercheure nobélisable,
11:47 qui se demande pourquoi les femmes à couche, qu'est-ce qui déclenche le travail.
11:51 Et on s'interroge toujours sur ce qui déclenche précisément le travail des femmes.
11:56 Voilà, ils sont deux ou trois à travailler en France sur cette question-là,
12:00 et ça, on ne le sait pas, moi, je l'ai découvert aussi.
12:02 Je tiens à dire qu'il y a donc toute une partie des podcasts qui est, qui parle de sciences dures,
12:09 et une autre, la deuxième partie, c'est plutôt les sciences sociales,
12:12 où là, je rencontre des historiens, des psychanalystes,
12:15 qu'est-ce que j'ai rencontré d'autres ? Des philosophes.
12:18 Et là, je me suis interrogée sur des absences, sur, entre autres,
12:23 je me suis interrogée sur ce que disait la philosophie de la grossesse et du corps des femmes.
12:29 Et là, j'ai compris qu'il y avait un impensé.
12:31 J'ai aussi vu que, par exemple, le fœtus a été longtemps le grand absent des études historiques,
12:37 et je me suis interrogée pourquoi, pourquoi il était absent.
12:41 Voilà, c'est un peu tout ce travail-là que j'ai fait, et sur la naissance, de la même façon,
12:45 j'ai travaillé avec des scientifiques et aussi avec des historiens.
12:50 Et je pense à un homme que j'ai rencontré, qui est le directeur de la maternité Cochin-Port-Royal,
12:59 qui s'appelle le docteur Gaufinet,
13:02 qui est un homme magnifique avec qui j'ai eu une très grande discussion sur l'éthique,
13:09 sur quand est-ce qu'on réanime ou pas un prématuré,
13:12 qui sont aussi des questions aujourd'hui très importantes,
13:15 puisqu'on peut réanimer de plus en plus tôt, et que la question du handicap est centrale.
13:20 Monsieur Gaufinet m'a parlé et m'a dit qu'aujourd'hui, à Port-Royal,
13:28 on ne peut plus accompagner les femmes enceintes comme on le devrait.
13:33 Voilà, qu'il n'a plus les moyens que le travail soit fait correctement.
13:38 On parle de Cochin-Port-Royal à Paris.
13:41 Voilà, après je peux vous parler de plein d'autres choses,
13:43 mais je pense que vous aurez des questions à me poser.
13:46 Merci.
13:48 Bonjour à toutes et à tous.
13:51 Je m'appelle Catherine Acouboisize, je suis journaliste au magazine Parents,
13:54 je suis responsable du service Société et Grossesse.
13:57 Je précise que je travaille depuis 20 ans sur les sujets parentalité,
14:01 dans le journalisme, donc j'ai pu avoir une vision assez large
14:06 de comment cette information a pu changer, comment nous, médias, on a pu s'adapter.
14:11 Le magazine Parents, c'est le magazine parental que tout le monde connaît,
14:16 de référence, il est édité depuis 1969, j'ai été rechercher la date pour vous, exprès.
14:20 C'est le leader de son secteur, il est lu par un million de lecteurs.
14:25 Dans mon métier, je co-réalise également un podcast dont le nom va peut-être faire sourire,
14:30 qui s'appelle "Galère sa mère", mais je trouve que c'est assez éloquent.
14:34 Chaque mois, on reçoit un expert sur une question liée à la parentalité,
14:38 et on essaye, un petit peu comme mes collègues, mes consœurs l'ont dit très bien,
14:43 de vulgariser au maximum, d'aller à la rencontre de ces experts
14:47 que les femmes ne connaissent pas forcément, et ne peuvent pas voir tous les jours
14:52 ou leur parler avec autant de naturel que nous on le fait.
14:56 Je travaille aussi pour le site du magazine, qui réunit quand même plus de 10 millions de visites,
15:01 1 million de followers sur Facebook, 165 000 sur Instagram,
15:05 donc voilà, on parlait des réseaux sociaux, nous on est en plein dedans tous les jours.
15:09 Je suis ravie d'être auditionnée aujourd'hui sur cette question,
15:13 d'autant que c'est pour nous un moment, une réflexion de tous les jours,
15:18 de se dire comment on peut faire pour informer mieux ces jeunes parents.
15:22 On se rend bien compte que ceux qui sont informés ne sont pas toujours ceux qui devraient l'être.
15:26 Il y a toujours un peu un souci là de cible,
15:30 ceux qui nous lisent ne sont pas ceux qui devraient nous lire,
15:33 donc comment on fait pour attraper les autres ?
15:35 C'est pour ça qu'on multiplie nous les canaux, comme tous les médias,
15:38 on fait des podcasts, on fait les réseaux, on est un peu partout,
15:42 on a développé beaucoup de vidéos aussi, parce qu'on se rend compte qu'il y a un lectorat
15:45 qui préfère la vidéo, qui préfère ça.
15:48 On a aussi développé des moments en présentiel,
15:52 finalement pour aller à la rencontre directement des gens,
15:54 ceux qui ne sont pas forcément lecteurs ou auditeurs ont envie aussi de s'informer,
15:58 donc c'est des nouveaux temps, c'est des ateliers,
16:02 on reçoit des experts comme Anna ou d'autres sur les sujets,
16:06 et on a directement les experts en face de nous pour leur poser nos questions.
16:10 Pour répondre un peu aux préoccupations du jour,
16:16 je dirais que nous on a réussi à comprendre qu'il y avait deux choses
16:20 qui intéressaient les lectrices et les lecteurs,
16:23 c'est à la fois une caution expert dans ce qu'on raconte,
16:26 ça c'est clairement une volonté,
16:29 je pense que les lecteurs ont envie d'être sûrs de ce qu'ils lisent,
16:32 et à la fois une caution testimoniale, c'est-à-dire du témoignage,
16:36 et en plus se contenter d'avoir juste le regard des experts,
16:40 même s'il est évidemment crucial.
16:43 Nous les femmes, et les hommes aussi, je les englobe, je pense qu'ils seraient d'accord,
16:47 on a envie d'entendre des histoires comme celle de René ou d'autres,
16:51 on a envie d'entendre du vrai, de l'authentique,
16:54 donc ça c'est vraiment important je pense,
16:57 pour être convaincu en fait il faut les deux,
16:59 ça ne suffit plus d'avoir des grands noms de la gynécologie,
17:04 parce que ça a beaucoup changé ça en 20 ans,
17:06 je pense à ce qu'on lisait avant, avant c'était le Laurence Pernoud,
17:10 ou globalement on avait le Friedman et le Pernoud,
17:13 et puis ça s'arrêtait là,
17:15 aujourd'hui les femmes sont beaucoup plus expertes elles-mêmes,
17:18 et veulent chercher.
17:20 Qu'est-ce que je peux vous dire aussi,
17:22 c'est que ça a été dit mais je le redis,
17:24 nous on cherche aussi à s'adresser à tous,
17:27 aux parents, même si on a du mal à avoir des hommes qui nous lisent,
17:31 il y en a quand même, aux coparents,
17:33 il faut aussi penser aux familles qui s'organisent complètement autrement,
17:35 aux couples homos, aussi aux mamans solos,
17:39 aux grands-parents, on a une nouvelle rubrique sur parents,
17:42 qui parle aux grands-parents,
17:43 parce que les grands-parents c'est aussi des acteurs forts de la parentalité aujourd'hui,
17:47 les femmes travaillant beaucoup plus,
17:50 ont fait appel à ces grands-parents,
17:51 qui sont plus ou moins ok pour venir garder les bébés,
17:54 mais voilà c'est aussi des questions,
17:55 parce qu'ils ont aussi eux leurs informations,
17:57 qui datent du Laurence Pernoud,
17:58 et qui des fois vont un peu percuter,
18:01 avec les informations que les mamans ont aujourd'hui sur les réseaux.
18:05 Donc voilà, il y a ça,
18:06 il y a évidemment les parents qui sont confrontés au handicap et au deuil,
18:09 qu'il ne faut pas oublier dans la cible,
18:11 qui ont été longtemps oubliés, même par les parentaux,
18:14 je pense que je peux le dire,
18:17 on fait très attention dans nos articles,
18:19 à ne pas véhiculer d'injonction,
18:21 parce que ça, ça nous a été reproché,
18:23 et reproché, et reproché maintes fois,
18:25 de parler avec un ton péremptoire,
18:28 d'être dans le "vous",
18:30 aujourd'hui on emploie le "nous",
18:32 on est toujours finalement là pour montrer ce qui existe,
18:37 donner à voir des informations,
18:39 mais surtout pas des injonctions.
18:42 Et les parents se saisissent eux-mêmes finalement de ce qui les intéresse,
18:45 là on prépare un dossier par exemple sur les colères,
18:48 il est hors de question de dire "voilà comment on va gérer les colères",
18:51 non, c'est "voilà ce que les experts disent sur les colères,
18:54 et après à vous de faire votre marché".
18:57 Donc le ton est aussi volontairement déculpabilisant,
19:00 parce que c'est vrai que,
19:02 on y reviendra sûrement,
19:04 mais c'est ce qui revient le plus sur les réseaux,
19:07 c'est vraiment la culpabilité.
19:09 C'est-à-dire qu'il y a tellement d'informations,
19:11 que finalement si on fait un choix,
19:13 on est toujours coupable de ne pas avoir fait l'autre,
19:15 puisqu'on nous donne à voir tous les choix possibles,
19:18 alors qu'avant il n'y en avait qu'un.
19:20 Donc la culpabilité, c'est vraiment sur ça qu'on essaye de travailler,
19:22 s'il y a peut-être, je ne sais pas si au Sénat on peut entendre ça,
19:25 mais mettre de l'humour dans la façon d'informer,
19:28 c'est vraiment aussi, c'est vraiment important.
19:31 Il n'y a rien de plus drôle qu'un sénateur, voilà, super.
19:33 Et bien en fait, mettre de l'humour,
19:35 c'est aussi un moyen que nous on essaye de développer beaucoup,
19:38 on a des stand-up, avec des humoristes,
19:40 pour qu'un magazine comme "Parents" fasse ça,
19:42 c'est vraiment, voilà, c'est le signe que le public a besoin de ça aussi,
19:48 pour se détendre, parce que c'est des sujets qui tendent les familles,
19:52 enfin c'est des vrais sujets de préoccupation graves,
19:55 et donc il faut réussir à atteindre la cible différemment.
19:58 Donc l'humour, ça peut être aussi une bonne manière de faire.
20:02 Voilà, donc comme je l'ai dit,
20:04 on essaye de mettre à dispo la parole des experts,
20:06 on fait des grands entretiens,
20:08 tout ça vous le savez certainement déjà,
20:11 voilà, il y a plein de choses qui existent dans le domaine de la parentalité,
20:14 plein de bons plans pour faire garder les bébés,
20:16 pour ceci, pour cela, mais le tout c'est de trouver,
20:18 il y a de plus en plus de choses,
20:20 donc nous on est là pour essayer d'aider.
20:23 Et on sent qu'on a vraiment un rôle important dans la grossesse des gens,
20:27 alors peut-être pas, je le ressens pas aussi fortement qu'Anna,
20:30 qui elle est dans un cabinet et au contact direct avec des patientes,
20:34 mais c'est vrai qu'on sent que le suivi de grossesse
20:37 qu'on peut faire sur internet, par des newsletters,
20:40 finalement, vient remplacer peut-être,
20:43 je dis bien peut-être, un suivi de grossesse
20:45 qui n'est pas toujours à la hauteur des attentes des futurs mamans.
20:49 Je pense par exemple à tout ce qui est mot de la grossesse,
20:51 qui est souvent balayé en consultation,
20:54 on entend beaucoup ça dans les témoignages,
20:56 pas partout bien sûr, et pas par les sages femmes.
21:00 J'interviens, mais c'est juste parce qu'on manque beaucoup de temps.
21:03 Oui, oui, oui.
21:04 Oui, mais en fait, ça vient palier au manque de temps que nous avons,
21:08 parce que moi j'adorerais passer une heure et demie avec chacune de mes patients,
21:10 ce que je fais plus ou moins, mais sans du coup pouvoir manger à la fin du mois.
21:13 Tout à fait, donc il y a un manque de temps de la part des professionnels,
21:16 mais aussi de certains, un manque de préoccupation.
21:19 Moi, pour l'avoir vécu, je suis maman aussi de trois enfants.
21:22 Puis je fais des faire.
21:24 Je fais des témoignages quasiment tous les jours avec des parents.
21:27 Souvent, les femmes ne sont pas écoutées en consultation.
21:30 Chez le gynécologue, il faut bien être clair.
21:33 C'est plus souvent chez le gynécologue que ça se passe.
21:36 Voilà, on appelle ça de la bobologie.
21:38 Voilà, alors que les mots de la grossesse,
21:40 c'est réellement quelque chose qui empêche parfois de travailler,
21:42 de dormir, de s'alimenter.
21:44 Donc voilà, c'est quelque chose qui est important
21:46 et que, en tant que média, on essaye de faire.
21:48 On a aussi développé un guide des maternités.
21:50 Je crois qu'il y aura une question par rapport à ça,
21:52 mais c'est vrai qu'il n'y a actuellement pas vraiment d'outil
21:54 qui recense finalement ces maternités avec les différents services.
21:59 Je mets des guillemets, mais avec tout ce qui peut intéresser les femmes
22:03 dans le choix de la maternité, ça n'existe pas d'un point de vue officiel.
22:06 Donc finalement, c'est les médias qui s'emparent de ce sujet là.
22:10 Il y a beaucoup aussi dans nos magazines et sur le site
22:15 de sujets sur l'alimentation de la femme enceinte,
22:17 qui est un sujet qui préoccupe énormément,
22:19 où les femmes ont aussi manque d'informations.
22:21 Là, on en a aussi parlé, mais beaucoup d'injonctions sur l'alimentation.
22:25 On est perdus.
22:26 Donc voilà, les femmes sont en demande de ça.
22:29 Voilà, pour terminer, je dirais que je ne sais pas si vous avez connu
22:33 la naissance des forums.
22:35 Ça a été dans les années 2000, une explosion incroyable
22:39 de femmes et de communautés qui se créent autour de la grossesse.
22:42 Aujourd'hui, ça n'existe plus.
22:44 Je crois que les réseaux sociaux ont largement pris le relais,
22:47 parce qu'ils sont beaucoup diabolisés, ces réseaux sociaux.
22:49 Mais je pense qu'ils apportent quand même énormément de soutien,
22:51 au final, aux femmes entre elles et à quelques pairs.
22:55 Voilà, j'en ai terminé pour ma présentation.
22:59 J'avais appuyé sur le mauvais bouton.
23:01 Merci pour vos témoignages, effectivement,
23:04 qui sont un peu disruptifs par rapport à toutes les auditions
23:10 qu'on a eues depuis maintenant, début mars.
23:13 En tout cas, complémentaires, à la fois disruptifs,
23:16 mais je pense qu'ils apportent un éclairage très important.
23:19 Je vous remercie.
23:20 Merci.
23:21 Merci.
23:22 Merci.
23:23 Merci.
23:24 Je pense qu'il y a une question qui vient d'être posée par un collègue.
23:28 C'est une question qui est, je crois,
23:30 un peu plus complémentaire à la fois disruptif,
23:33 mais je pense qu'il apporte un éclairage important
23:36 et peut-être, vous l'avez dit, insuffisamment utilisé,
23:40 en fait, pour le suivi de la maman et de son bébé.
23:45 Excusez-moi, je peux vous poser une question, encore ?
23:47 Ils sont disruptifs ?
23:48 Ils sont disruptifs parce qu'on était sur des professionnels
23:51 d'organisation territoriale, des choses bien plus...
23:54 Donc, effectivement, sur des associations,
23:56 là, c'était peut-être un peu plus sur ce chemin-là,
23:58 mais voilà, vous avez des profils.
24:00 Aujourd'hui, nous entendons des profils particuliers,
24:03 et je crois que c'est à la fois important.
24:06 J'ai pas mal de petites questions.
24:08 Je vais essayer de les synthétiser.
24:10 Ça ne va peut-être pas être simple.
24:12 Je vais essayer de m'y astreindre.
24:15 Alors, déjà, une question générale à laquelle les unes ou les autres
24:19 répondront de manière, voilà, comme vous le souhaitez.
24:22 J'aurais une première question, quand même,
24:24 je vais la faire très courte.
24:26 Vous avez évoqué souvent l'isolement, aujourd'hui,
24:30 des mamans ou des familles, les problèmes de santé mentale, etc.
24:34 Qu'est-ce que vous pensez du concept de la Maison des mille jours ?
24:38 Ça va être une première question à laquelle je vous laisserai répondre.
24:43 Ensuite, je vais vous rappeler le contexte, en fait, de cette mission.
24:46 C'est une mission qui est née d'un rapport de l'Académie de médecine
24:51 sur les maternités de moins de 2000 accouchements par an,
24:59 qui préconisait, c'est un peu rapide ce que je dis,
25:03 mais globalement, de dire que ces maternités de moins de 2000
25:06 accouchements par an devaient se regrouper et ne plus garder
25:10 que des plus grosses maternités.
25:12 Ensuite, on a décidé de faire cette mission.
25:15 On a entendu des professionnels qui allaient globalement
25:18 à peu près dans le même sens, mais de manière un peu plus atténuée,
25:21 qui mettaient plus en avant les équipes sécuritaires,
25:24 c'est-à-dire d'avoir des équipes stables de professionnels,
25:27 gynéco-obsécré-impédiates.
25:28 On était toujours dans le monde de la sécurisation de l'accouchement.
25:32 Ensuite, on a beaucoup entendu parler, un deuxième versant,
25:35 donc un peu plus ce que vous dites, c'est-à-dire sur l'entourage
25:38 de la parturiante, le moment de l'accouchement et l'après-accouchement,
25:43 avec le bien-être de la maman et son libre choix.
25:47 Moi, j'aurais également une question à vous poser.
25:50 Aucune d'entre vous n'a parlé du moment de l'accouchement,
25:53 du lieu de l'accouchement, du choix de ces mamans.
25:58 Donc, en fait, est-ce que vous pensez, est-ce que vous avez des retours ?
26:02 Est-ce que c'est un choix ? La petite, la grande maternité,
26:05 quelle est, d'après toutes les expériences que vous avez,
26:08 comment se fait le choix des mamans sur le lieu de l'accouchement ?
26:12 Est-ce que ce choix vous semble suffisamment éclairé ?
26:16 Est-ce que, comment on fait l'équilibre entre la,
26:20 comment on explique l'équilibre entre la sécurité nécessaire
26:23 et la proximité ? Voilà, pareil, deuxième question,
26:27 probablement assez large. Et en fait, pour Madame Roy,
26:32 vous avez une double casquette, donc de chroniqueuse
26:35 et également de professionnel de santé.
26:38 Comment vous appréhendez le déferlement d'informations,
26:41 mais surtout les fausses informations et l'augmentation du nombre
26:43 de contenus d'influenceuses qui véhiculent des concepts,
26:48 des conseils, parfois faux, mais surtout quelquefois dangereux
26:52 pour la santé des femmes ? Et puis, Madame Gussard,
26:54 vous avez évoqué la période du postpartum et de votre propre expérience
26:59 que vous présentez dans votre livre, d'ailleurs.
27:02 Pensez-vous que la préparation des femmes, pensez-vous que l'information
27:08 et tout ce qui tourne autour du postpartum, autour de la santé mentale,
27:13 de son appropriation par les professionnels ou l'entourage
27:17 est aujourd'hui suffisamment communiqué ?
27:20 Les femmes en sont-elles suffisamment informées ?
27:23 On vous laisse répondre. Vous pouvez chacune participer.
27:30 Et peut-être le poids de la société, sur la charge mentale
27:35 qu'on peut avoir aujourd'hui dans notre société.
27:38 Je vais essayer de répondre dans l'ordre à ce que vous avez dit,
27:41 sur la question du choix. Je trouve ça intéressant que vous demandiez
27:44 si le choix est éclairé parce que moi, à mon sens, il n'y a pas beaucoup de choix.
27:48 C'est-à-dire que ce n'est même pas un défaut d'information,
27:50 c'est un défaut de moyens. En fait, les femmes aujourd'hui,
27:53 et Anna en parlera très bien, aimeraient avoir, tout le monde,
27:57 un bon accouchement. Ce qu'elles aimeraient, c'est un suivi de qualité,
28:00 une sage-femme par femme. Et actuellement, en fait,
28:04 ce n'est pas possible puisqu'il y a des maternités qui ferment en permanence,
28:07 que l'hôpital public est dans un état délétère.
28:10 Donc, en fait, il n'y a pas de choix. En général, on va un peu...
28:15 On fait au mieux. Quand on a le choix, c'est qu'on en a les moyens.
28:18 Moi, par exemple, j'ai accouché dans une maison de naissance,
28:21 et je mesure à quel point j'ai eu de la chance.
28:24 En l'occurrence, j'ai été transférée, parce que c'était compliqué.
28:27 Mais le suivi que j'ai eu dans une maison de naissance,
28:30 qui est un suivi exceptionnel, qui n'est pas donné à tout le monde,
28:33 et qui est un suivi nécessairement, en fait, il devrait être accessible
28:36 à toutes les femmes. Et en fait, il a fallu que j'aille dans une maison de naissance
28:39 pour que j'ai ce suivi d'une sage-femme qui me suive pendant toute ma grossesse,
28:42 qui soit là pendant mon accouchement. Voilà. Et ça, en fait,
28:45 c'est aussi le choix de ne pas avoir de péri-durale.
28:48 Mais quelque part, en fait, il aurait fallu que je puisse avoir
28:51 à ma disposition cette même qualité de suivi en faisant le choix d'une péri-durale.
28:54 C'est complètement anormal qu'il faille en passer par là, quelque part,
28:57 pour avoir cette qualité de suivi. Ça, c'est la première chose.
29:01 Et je pense que dans les mille jours, je vais laisser Anna s'exprimer,
29:04 parce que je sais qu'on sera d'accord et qu'elle dira les choses beaucoup mieux que moi.
29:07 - Je vais compléter quand même ma question. Vous avez répondu en partie,
29:10 mais je voudrais vous interroger, en fait, sur le non-choix, alors,
29:14 que l'on a aujourd'hui. Et comment vous rendez l'équilibre ?
29:19 Pensez-vous que les femmes sont aujourd'hui dans le contexte que l'on a ?
29:22 Effectivement, si on avait une sage-femme par femme,
29:25 les conditions idéales, je pense qu'on ne serait peut-être pas là, d'ailleurs,
29:28 aujourd'hui. Aujourd'hui, on est face à une difficulté dans notre pays
29:31 et que d'autres pays ont rencontré, effectivement, d'éloignement,
29:35 de maternité, vous l'avez dit, qui ferme par défaut de professionnel,
29:38 des choses comme ça. Est-ce que vous pensez aujourd'hui,
29:41 s'il y avait une réflexion à avoir, est-ce que les femmes sont suffisamment
29:46 éclairées pour faire, je redis le mot choix, mais dans "je ferme une maternité"
29:52 ou "je regroupe des plateaux techniques", j'éloigne un peu de la distance
29:55 pour plus de sécurité ? Donc c'est la balance entre la sécurité d'un côté
30:00 et la proximité. Est-ce que vous pensez que tout ça, aujourd'hui,
30:03 sont des concepts qui sont suffisamment vulgarisés ?
30:06 Bien sûr que non, qu'ils ne sont pas suffisamment vulgarisés.
30:12 D'abord parce que c'est finalement assez récent et qu'en plus,
30:14 c'est inaudible pour la plupart des gens. Quand vous leur dites,
30:17 pour des gens qui viennent de s'installer en ruralité et que vous leur expliquez
30:22 qu'il va falloir faire une heure et demie de voiture, ils ne peuvent pas
30:25 se satisfaire de ça. Alors je sais que, moi je suis d'accord sur les constats.
30:29 De fait, les maternités qui réalisent peu d'accouchements en termes de sécurité
30:33 médicale n'offrent pas les garanties suffisantes, en particulier à cause
30:36 des problèmes de personnel. C'est une réalité. Toutefois, les solutions
30:40 apportées à ça, et c'est là où je diffère avec ce que j'ai pu entendre ailleurs,
30:44 je pense qu'il faut garantir, mais pas seulement pour des histoires
30:48 de sécurité médicale, mais aussi pour une histoire de faire vivre
30:51 ces régions-là. Je pense que la maternité, c'est un peu, je ne sais pas comment dire,
30:56 mais c'est un endroit vraiment très important dans ce que ça dit du territoire.
30:59 Et donc moi, je pense qu'il faut vraiment se battre pour maintenir
31:02 des maternités avec un bon niveau de sécurité. Et je pense que ça doit être
31:05 une priorité, en particulier pour ne pas que ces régions-là se dépeuplent.
31:08 La maternité, ce n'est pas seulement un enjeu. Donc, est-ce que les femmes
31:14 sont assez informées sur le choix ? Même quand elles ont le choix,
31:16 la réponse est non. Et c'est d'ailleurs à l'origine de beaucoup de problèmes,
31:20 parce qu'en fait, c'est exactement comme sur le choix d'un restaurant.
31:22 Si vous avez envie de manger Thaï et que vous vous retrouvez dans un restaurant
31:25 de choucroute, vous avez toutes les raisons d'être très mécontent.
31:27 C'est pareil pour la maternité. Il y a des femmes qui vont dans des maternités
31:30 sans savoir ce qu'elles proposent, et qui du coup, après, sont furieuses,
31:33 ont une dissonance entre ce qu'elles attendaient et ce qu'elles ont.
31:35 Donc, c'est hyper important, moi je le fais, d'essayer de leur faire comprendre
31:40 qu'il y a des maternités labellisées IHAB, qu'il y en a d'autres qui sont type 1, type 3,
31:43 type 2, type 3. Et ça, c'est un point très important, qui me semble le dire,
31:47 c'est qu'en fait, à chacune son choix. Moi, je commence à en avoir un peu soupé
31:50 d'entendre des gens dire "le mieux, c'est d'accoucher en maison de naissance,
31:53 le mieux, c'est d'accoucher en type 3". En fait, à chaque femme, son choix.
31:56 Il faut qu'elle ait les clés du choix, pour qu'elle puisse faire son choix.
31:59 Après, malheureusement, une fois qu'on a dit ça, on n'a rien dit.
32:02 C'est-à-dire que les conditions de travail dans les maternités, moi j'avais lancé
32:04 un mouvement qui était un hashtag "je suis maltraitante" qui a eu une grande résonance
32:07 dans la vie civile, parce qu'en fait, oui, on a quand même un gros problème
32:12 dans nos maternités, et que si on continue comme ça, l'augmentation de la mortalité
32:16 va être... on attend les catastrophes. Y compris, on le disait à Port-Royal,
32:22 je pense que tous mes confrères, tous mes consoeurs seront d'accord pour ce que je dis,
32:27 c'est qu'on joue avec la vie des gens, et quand on joue pas avec leur vie,
32:31 avec leur santé physique, on joue avec leur santé psychique. Et en France,
32:34 on a beaucoup de mal à prendre en compte la santé mentale comme faisant vraiment
32:37 partie intégrante de la santé. C'est-à-dire qu'on sauve les corps,
32:40 mais tant pis si les têtes sont foutues en l'air, et ça c'est quand même vraiment embêtant.
32:43 Donc, bon, mais en fait j'ai pas répondu à la question.
32:46 Si je peux me permettre, j'ai un chiffre que je trouve intéressant,
32:50 que je me permets de déposer, dans le contexte de précarisation des maternités,
32:55 depuis les années 70, fermées ou regroupées pour des raisons financières,
32:59 elles sont trois fois moins nombreuses à peu près, au temps de naissance,
33:04 en fait, depuis les années 70. Donc il faut s'imaginer qu'on a le même nombre de naissances,
33:07 et qu'on a trois fois moins de maternités. Et donc, évidemment,
33:10 que ça s'est fait au dépens des femmes et des bébés.
33:13 Donc il y a quand même ce préliminaire sur la question du choix,
33:16 de dire voilà le contexte dans lequel on est.
33:19 Oui, là on m'entend. En fait, je me souviens d'un témoignage,
33:26 et ça me fait penser au débat qu'on a actuellement.
33:29 Un couple qui attendait son deuxième enfant m'a confié choisir sa région
33:35 pour déménager, en fait, en fonction d'une adresse de maison de naissance.
33:39 Parce que eux faisaient partie des très informés, et de ceux qui avaient envie de ça,
33:45 parce que comme dit Anna, tout le monde n'en a pas envie, mais avaient envie de cette maison de naissance.
33:48 Donc ils ont été là où il y avait la maison de naissance.
33:51 Donc on en arrive quand même à une situation qui est un peu folle.
33:55 C'est comme la carte scolaire à la fin.
33:57 Voilà, c'est exactement ça.
33:59 Avant de laisser la parole à mes collègues qui ont sûrement des questions,
34:04 moi j'ai plusieurs réflexions.
34:06 Je me demande si le problème de fond, ce n'est pas l'isolement.
34:10 Moi, comme pédiatre, j'ai quand même constaté que les parents sont isolés,
34:15 et on ne parle pas de la grossesse avant d'être enceinte.
34:18 On n'en parle pas, à mon avis, suffisamment en amont.
34:20 Ça, c'est une première question.
34:22 Mais ensuite, pour Madame Vannier,
34:24 comment votre antenne France Inter a-t-elle accueilli vos projets de podcast ?
34:30 Est-ce que ça a été facile à faire passer ?
34:33 Est-ce que vous avez eu des difficultés à le mettre en route ou à convaincre ?
34:42 Pas du tout.
34:43 Je suis très contente.
34:45 Je pense qu'ils auraient été encore plus contents
34:47 si j'avais été sur la parentalité.
34:49 Mais je trouvais qu'il y avait justement déjà beaucoup de supports
34:52 et beaucoup d'informations sur la parentalité.
34:54 C'est pour ça que je me suis mise un peu de côté
34:57 et que j'ai choisi d'être sur les chercheurs scientifiques
35:02 et les dernières découvertes scientifiques.
35:04 Au contraire, il y a une grande attente et une grande vie à France Inter.
35:09 Sur ce podcast, il y avait beaucoup de désirs.
35:12 Oui. Non, non, j'ai été entendue sans difficulté.
35:18 Je voudrais juste dire qu'en presse écrite, en radio,
35:24 je pense qu'il n'y a pas de problème.
35:26 En revanche, j'ai constaté qu'en télé, c'était compliqué.
35:29 Toi, tu as la maison des maternelles qui est là,
35:32 donc ça contredit ce que je dis.
35:34 Mais plusieurs fois, il y a des journalistes télé
35:36 qui sont venus me voir en me disant qu'il faut absolument
35:38 qu'on fasse un reportage, un documentaire
35:40 sur les difficultés de la parentalité.
35:42 Et en fait, ils se cognent à des producteurs
35:44 qui, je suis désolée de le dire, sont souvent des hommes
35:46 dont ce n'est pas le sujet,
35:47 et qui considèrent que c'est des sujets de bonne femme.
35:49 Et plusieurs fois, on m'a dit que je n'arrive pas à faire passer ces sujets.
35:52 C'est trop compliqué.
35:53 Je ne sais pas ce que tu en penses, Anna.
35:55 Sur les documentaires, je suis d'accord.
35:57 Mais après, je voudrais saluer mon émission,
36:00 La maison des maternelles.
36:01 Ce n'est pas parce que je travaille pour eux,
36:03 je l'écoutais bien avant.
36:04 Je trouve que c'est une émission remarquable.
36:06 Et pour le coup, je pense que si les gens me reconnaissent autant,
36:09 pleurent et tout dans mes bras partout,
36:11 c'est à cause de cette émission qui est vraiment un point très important
36:14 pour les parents, où il y a une pluralité de personnes
36:16 qui s'expriment et qui est vraiment un soutien.
36:18 D'ailleurs, moi, je trouve ça un peu tragique.
36:20 C'est que souvent, quand je vois les gens, on me dit
36:22 « Mais vous savez, Anna, ça a été toute ma vie,
36:24 la maison des maternelles, ça a remplacé le suivi médical. »
36:26 Donc c'est un peu tragique, parce que ça occupe une place
36:28 que ça ne devrait pas occuper.
36:29 Mais en tout cas, en télé, il y a quand même
36:31 La maison des maternelles, qui, je trouve,
36:33 avec beaucoup de manque d'objectivité,
36:35 une très belle émission de service public.
36:37 Pour Mme Varier, est-ce que vous pensez
36:43 que le côté scientifique, justement, est suffisamment abordé
36:47 lorsqu'on cherche à vulgariser, finalement, comme vous l'avez fait ?
36:51 Est-ce que vous parliez du foetus qui n'a jamais été étudié
36:56 sur le plan physiologique ?
36:58 Non, il a été étudié, mais on est en train de...
37:00 Je continue, parce que j'ai d'autres interrogations.
37:04 Moi, ce qui m'a frappée dans mon exercice de pédiatre,
37:07 j'ai pu réanimer des bébés jusqu'à 24 semaines.
37:10 Comment arriver à faire comprendre aux parents
37:17 que ça peut mal se passer, qu'il peut y avoir quelque chose
37:20 et qu'en même temps, on puisse sauver leur bébé ?
37:22 En amont, est-ce qu'on doit informer de la physiologie
37:27 ou de la pathologie de la grossesse,
37:29 puisque vous rentrez dans des sujets scientifiques ?
37:31 Et comment arriver à toucher tous les publics ?
37:35 Parce que moi, quand je faisais une visite médicale en maternité,
37:39 sur 15 femmes, il y en avait deux qui ne savaient pas lire.
37:41 Je suis peut-être dans une zone un peu défavorisée,
37:43 mais néanmoins, comment est-ce qu'on arrive à toucher
37:45 autrement que par TikTok ou des réseaux sociaux ?
37:48 Ces parents qui pourraient être confrontés à des difficultés,
37:52 comme tout le monde.
37:54 Quelle est votre abordage ?
38:00 Je ne sais pas si je suis compétente pour répondre à cette question.
38:03 Tout ce que je peux dire, c'est que par exemple, à Cochin,
38:06 à la maternité Cochin-Port-Royal, ils ont mis à place
38:09 tout un protocole pour accompagner les parents
38:12 en cas d'extrême prématurité.
38:14 Et justement, on informe les parents des risques
38:18 et de ce que ça veut dire.
38:20 Ça, ça a été mis en place.
38:22 Et ça, justement, pour reparler du Dr. Gauffiné,
38:24 du Professeur Gauffiné, il a beaucoup travaillé
38:26 sur cet aspect-là, de l'information aux parents.
38:28 Mais avant de donner une information aux parents,
38:31 il faut déjà que, et vous le savez, puisque vous êtes pédiatre,
38:34 il faut déjà que tous les soignants soient d'accord
38:38 avec la décision à prendre.
38:40 Et là, en fait, ce qu'on voit, mais là, je parle d'un cas
38:43 très précis sur l'extrême prématurité,
38:45 on voit que c'est les rapports de chacun au handicap
38:48 qui est en jeu.
38:50 Et qu'en fonction des territoires et du rapport
38:52 du médecin de garde ce jour-là sur le handicap,
38:54 un enfant va être réanimé ou pas.
38:57 Et ça, je sais qu'il y a un gros travail de recherche
39:00 et de protocole, justement, pour uniformiser les...
39:04 Enfin, pour être d'accord sur l'information
39:07 qu'on va donner aux parents, pour qu'ils sachent
39:10 quel risque il y a quand il y a extrême prématurité.
39:13 Mais là, je suis dans un cas particulier.
39:15 Et après, je ne suis pas compétente pour répondre
39:18 à vos autres questions. Anna, bien sûr.
39:21 - Moi, je pense qu'il faut, quand on informe,
39:23 il ne faut jamais mentir. Je pense que c'est la clé
39:25 de l'information. Et donc, il ne faut pas avoir peur
39:28 d'aborder la mort fétale unitéro, les pathologies
39:30 qui peuvent être extrêmement graves.
39:32 Parce qu'à partir du moment où vous mentez aux gens,
39:34 ils le sentent et ils ne vous font plus confiance.
39:36 Donc, il faut... Moi, je parle de mort fétale,
39:38 je parle de diabète. Parce que, par exemple, on se dit
39:40 il faut se méfier du diabète gestationnel,
39:42 il faut se méfier du diabète gestationnel.
39:43 Si vous dites ça aux gens, ils disent
39:44 "Oh, qu'est-ce qu'ils nous font chier avec notre poids, etc."
39:46 Par contre, si vous leur dites, en fait,
39:47 le diabète gestationnel, le risque, c'est la mort fétale unitéro,
39:49 alors, ils reçoivent l'information et ils disent
39:51 "Ah, d'accord, c'était ça, le risque."
39:53 Donc, je pense qu'il faut informer des risques
39:55 de façon très... telle qu'on les connaît, en tout cas.
39:57 - Je peux...
40:00 J'y vais. Voilà.
40:03 Ah. Je voulais juste dire que je pense que là,
40:07 on est arrivé à un tel degré d'information
40:09 pour le grand public. De toute façon,
40:11 il y a tellement de sources d'information,
40:12 les gens sont tellement plus informés qu'avant
40:14 qu'on ne peut plus faire comme s'ils ne l'étaient pas, en fait.
40:17 Il y a vraiment, je pense, un changement sociétal
40:19 important à ce niveau-là.
40:20 Donc, la relation médecin-patient ou sage-femme-patient
40:24 a tellement changé que, de toute façon,
40:27 on est obligé, entre guillemets, d'expliquer
40:30 et de faire confiance aussi aux gens,
40:32 puisqu'ils sont quand même tous, à priori,
40:34 capables de comprendre, même s'ils ne savent pas lire
40:36 en français, il y a des façons de traduire
40:39 et d'expliquer.
40:40 Et en fait, chacun maintenant a son mot à dire
40:44 par rapport à sa santé, par rapport à la façon
40:47 dont les femmes vivent leur grossesse
40:49 et leur accouchement.
40:50 On ne peut plus revenir en arrière.
40:51 Donc, j'ai l'impression qu'il y a un peu ce fantasme
40:53 de la part des professionnels de santé
40:55 de se dire "Bon, elles vont nous écouter".
40:57 C'est gênant, en fait, quand les femmes
40:59 ont beaucoup d'informations, alors que, finalement,
41:01 plus elles en ont et mieux c'est.
41:03 Donc, je crois qu'il faut y aller à fond.
41:06 - Oui, pardon.
41:10 Excusez-moi, je voulais juste ajouter
41:12 que vous disiez...
41:14 Quand vous disiez "autrement que sur TikTok",
41:16 moi, je trouve cette phrase intéressante
41:18 quand vous dites "elles peuvent s'informer
41:20 autrement que sur TikTok".
41:21 Parce qu'en fait, quand c'est bien fait,
41:23 il n'y a pas de problème à ce que ça soit sur TikTok.
41:26 Et je pense qu'il y a vraiment un truc à jouer
41:28 du côté d'un message, effectivement,
41:30 public, sanitaire, qui soit présent
41:32 là où les gens vont chercher leurs informations.
41:35 Et ce que je voulais dire, c'est qu'il y a un truc
41:38 dont on parle très peu aux parents
41:40 et qui est pourtant quelque chose de très simple,
41:42 c'est les phobies d'impulsion.
41:43 Je ne sais pas si vous voyez ce que c'est,
41:45 je peux vous expliquer.
41:46 On appelle ça des pensées intrusives,
41:48 la phobie d'impulsion, voilà.
41:49 On s'imagine mettre un coup de couteau
41:51 à son bébé, le jeter par la fenêtre.
41:53 Vous voyez ce que je veux dire ?
41:54 Tout le monde l'a vécu, tout le monde l'a ressenti,
41:56 dans la joie et la bonne humeur.
41:58 Ce truc-là, c'est connu.
41:59 Il y a vraiment une majorité de parents
42:01 qui, en Suède, les parents ont des fascicules
42:04 qui leur sont données, où on leur dit
42:06 "vous allez avoir des pensées intrusives,
42:08 des phobies d'impulsion".
42:10 En France, ça n'existe pas.
42:11 Et en fait, quand ça arrive,
42:12 les gens se prennent pour des monstres.
42:13 Et moi, je pense qu'il y a des choses à jouer
42:15 pour dire que tout ça existe, que c'est normal.
42:18 Et il y a une mythification de la parentalité,
42:22 du rôle de mère en particulier.
42:24 Une toute petite parenthèse,
42:26 on parle beaucoup des mères et des enfants.
42:27 Moi, je trouve ça hyper important
42:28 qu'on s'adresse à tout le monde
42:30 parce que les co-parents sont très importants
42:32 même au moment de l'accouchement.
42:33 Ce n'est pas du tout des moments
42:35 où seules les femmes doivent être informées.
42:40 Et voilà, ce que je veux dire,
42:41 c'est que je pense qu'il y a vraiment
42:42 des manières d'informer tout le monde
42:44 et sur les choses les plus difficiles.
42:46 Parce que pour l'instant, le problème,
42:47 c'est qu'on est dans des images,
42:49 encore aujourd'hui, même si ça a beaucoup changé.
42:51 Moi, j'ai deux enfants.
42:52 Il y en a un qui a 9 ans,
42:53 le petit, il a 19 mois.
42:54 Je vois bien que ce n'est vraiment
42:55 plus le même monde, en fait, aujourd'hui.
42:57 Les informations négatives circulent.
42:59 Un compte comme celui d'Anna Roy,
43:01 je ne l'avais pas, même par ron.fr,
43:03 ils n'étaient pas sur Instagram.
43:04 Donc, il y a une accessibilité aujourd'hui
43:06 qui est vraiment bien répandue.
43:07 Mais il y a encore des gens
43:08 qui tombent de leur chaise.
43:10 Et quand je dis de leur chaise,
43:11 c'est une chaise de 3 mètres de haut.
43:12 Donc, voilà.
43:14 Je voudrais rajouter quelque chose
43:16 sur la santé mentale.
43:17 Il se trouve que j'ai rencontré
43:19 un psychiatre qui est chercheur en neurosciences
43:22 et qui a travaillé sur le cerveau maternel.
43:25 Et c'est très intéressant
43:26 parce que grâce à l'évolution de l'imagerie,
43:29 aujourd'hui, les neurosciences
43:31 peuvent s'emparer du cerveau maternel
43:33 et voir ce qui s'y passe pendant la grossesse,
43:36 après la grossesse, après l'accouchement.
43:39 Pas pendant l'accouchement,
43:40 mais après l'accouchement.
43:42 Et j'ai été très intéressée
43:43 par ce qui était dit sur les changements
43:45 qui opèrent dans le cerveau,
43:47 c'est-à-dire le rétrécissement du cerveau,
43:48 des tas de choses très étonnantes
43:50 dont je n'avais jamais entendu parler.
43:52 Mais surtout, c'est un discours
43:53 très déculpabilisant pour les femmes.
43:55 Et ce qu'elles pourraient ressentir,
43:57 le manque de concentration,
43:58 des choses comme ça.
43:59 Je pense qu'il faudrait aussi informer
44:01 des progrès de la neurosciences
44:03 sur ce qu'on a appris sur le cerveau maternel.
44:05 Parce que là, il y a vraiment
44:08 des progrès extraordinaires
44:10 qui vont permettre aux femmes
44:11 de comprendre ce qui leur arrive
44:13 et de comprendre ce qui se passe dans leur tête.
44:16 Parce que là, il y a des choses,
44:17 on sait des choses aujourd'hui,
44:18 c'est tout nouveau.
44:20 Ça, par exemple, il y a une mission d'information
44:22 sur la neurosciences,
44:24 sur les progrès de la neurosciences
44:26 sur le cerveau maternel.
44:27 Ça, j'en suis sûre.
44:28 Ça faudrait vraiment informer là-dessus.
44:30 C'est vrai, ça a complètement changé
44:32 la perception qu'on avait du cerveau de la mère.
44:35 Et je ne vais pas vous raconter
44:38 ce qu'on m'a dit, mais c'est dingue.
44:40 C'est incroyable ce qui se passe
44:41 dans notre cerveau quand même.
44:42 Et tout ce qui se passe sur
44:44 tout ce temps de latence
44:46 pour que le cerveau comprenne,
44:49 acquiert, enfin je ne sais pas comment dire,
44:52 qu'à l'intérieur de lui,
44:54 change sa perception de l'intérieur du corps
44:57 pour qu'il prenne en compte
44:59 la présence du foetus.
45:00 Et c'est ce décalage-là
45:02 qui peut expliquer pas mal de pathologies.
45:04 Et ça, quand on sait ça,
45:06 je trouve que si les femmes savaient ça,
45:08 que le temps que le cerveau s'adapte
45:10 à cette nouvelle situation dans son corps
45:12 et puisse la comprendre, cette situation,
45:15 ça explique beaucoup de choses.
45:18 De la même façon qu'après l'accouchement,
45:20 le cerveau va encore mettre du temps
45:22 à se réadapter à cette nouvelle situation.
45:24 Et c'est cet écart, ce temps de latence
45:26 qui peut aussi expliquer
45:28 des pressions postpartum
45:30 et des choses comme ça.
45:31 Donc là, je pense que là,
45:32 il y a des choses nouvelles à dire.
45:34 Il y a des gens pour ça.
45:35 Un nouveau sujet de podcast pour vous.
45:37 Non, non, c'est dedans.
45:38 C'est dedans.
45:39 C'est dans celui sur la naissance.
45:40 C'est dedans.
45:41 Alors, je vais saluer l'arrivée
45:43 de la présidente,
45:45 Madame Jacquemet,
45:47 et M. Joly avait une question.
45:52 Annie aussi ou pas ?
45:55 Je pense que vous avez plusieurs questions.
45:57 Donc, on va aborder
45:59 les questions de mes collègues,
46:01 si vous voulez,
46:02 qui sont passionnés autant que nous
46:05 par vos interventions.
46:07 Je commence alors.
46:13 Eh bien, bonjour, bonjour à toutes et à tous.
46:16 Désolée pour mon retard.
46:18 J'arrive juste.
46:20 Je vous ai entendu, Madame Grosard,
46:23 dire...
46:24 Alors, peut-être que vous l'avez expliqué avant.
46:26 Je suis désolée,
46:27 comme je prends en route.
46:29 Je vous ai entendu dire
46:30 il y a un monde entre mes deux enfants,
46:32 un de 9 ans et l'autre de 19 mois.
46:35 Quel est ce monde ?
46:37 Comment ça a évolué en 7 ans, finalement ?
46:40 Et pourquoi est-ce que c'est tellement différent
46:42 entre il y a 9 ans et il y a 19 mois ?
46:46 Merci pour cette question.
46:48 Quand j'ai accouché il y a 9 ans d'Ulysse,
46:52 il y avait très peu d'informations qui circulaient.
46:55 Je pense que le mouvement féministe,
46:57 la quatrième vague du féministe,
46:59 est aussi passée par la maternité,
47:01 ce qu'on appelle le mater féminisme,
47:03 et que les femmes, en fait,
47:05 se sont mises à parler.
47:06 Elles se sont mises à parler sur tout.
47:08 Et peut-être qu'on les a mieux entendues aussi.
47:10 Quand moi j'ai accouché,
47:13 je suis tombée des nues.
47:15 Je n'ai pas compris ce qui m'arrivait.
47:17 J'avais fantasmé un enfant à qui j'allais faire des gâteaux
47:19 pour son anniversaire, lui faire l'avion.
47:21 Et j'ai découvert ce que ça voulait dire
47:24 que d'être parent.
47:26 C'était un chaos qui était à la fois physique,
47:29 parce que ça mange ses journées, un enfant,
47:31 et puis aussi psychique,
47:32 parce que je suis persuadée qu'on devrait recommander
47:34 à tous les gens qui vont faire un enfant
47:36 de faire une thérapie avant.
47:37 Parce que quand on devient parent,
47:38 on tombe sur ses propres parents,
47:39 on tombe sur l'enfant qu'on a été.
47:41 C'est très dense, psychologiquement,
47:43 c'est pas rien.
47:45 Donc il n'y avait pas beaucoup d'informations
47:48 à ce moment-là.
47:49 C'est pour ça que j'ai fait mon livre, d'ailleurs.
47:51 Et sur la grossesse,
47:52 et puis ensuite choisir d'être mère.
47:54 En devenant mère de mon petit garçon, Orso,
47:58 j'ai été sidérée par le nombre d'informations
48:02 qu'il y avait.
48:03 La multiplication des informations
48:05 sur la parentalité,
48:06 elle existe depuis longtemps.
48:07 Et j'ai été très intéressée par les chercheurs,
48:09 je vais éviter de vous citer les sociologues
48:11 que j'avais notés sur ce sujet,
48:13 qui racontent très bien comment l'enfant
48:14 est devenu une valeur sociale au XXe siècle.
48:16 Et du coup, on l'a beaucoup investi.
48:18 Tout ça, c'est quelque chose qui est très documenté.
48:21 Mais en tout cas, ce qui est sûr,
48:22 c'est qu'à ma disposition,
48:23 j'avais désormais des comptes Instagram excellents.
48:26 Celui d'Anna en fait partie.
48:27 Bliss, qui est le podcast de Clémentine, est super.
48:31 J'avais des voix de femmes qui me parlaient,
48:32 qui me racontaient leurs expériences.
48:34 J'avais des parents qui me racontaient des choses.
48:36 Et voilà, c'était complètement différent.
48:38 Et il y avait aussi, je pense qu'il y a aussi un business
48:40 qui s'est mis en place autour de la grossesse,
48:43 de l'accouchement.
48:45 Et moi, je viens d'un milieu
48:46 qui est un milieu de classe moyenne sup, on va dire.
48:49 Et j'ai pu accéder à des choses
48:50 qui n'étaient pas envisageables à l'époque.
48:52 Notamment, je me suis préparée à mon accouchement
48:53 par l'hypnose,
48:55 avec une formation qui était super
48:57 d'une fille qui s'appelle Manon Galigné.
49:00 Ça m'a été utile et c'était super.
49:03 Et souvent, je regrette qu'elle ne soit pas remboursée
49:04 par la sécurité sociale.
49:05 Parce qu'en fait, ce qu'elle fait
49:06 pourrait être utile à plein de gens.
49:08 Et c'est un peu dommage
49:10 que ça ne profite qu'à des femmes comme moi
49:12 qui sont informées.
49:13 Et elle, elle est sur Instagram aussi.
49:15 Elle a son compte, elle donne des informations.
49:17 En fait, vraiment, ça n'a rien à voir.
49:20 C'est complètement différent.
49:22 Mais il y a encore plein de choses à faire.
49:26 Je veux dire, c'est pas du tout...
49:28 Notamment, je pense qu'il y a des choses à faire
49:30 sur les informations fausses qui circulent,
49:32 sur...
49:34 Il y a encore...
49:35 Moi, je suis toujours ulcérée
49:36 quand je vois quelqu'un commenter
49:37 sous Facebook "après la naissance d'un enfant,
49:39 que du bonheur".
49:40 Je trouve que cette phrase devrait être punie par la loi.
49:43 Parce que ce n'est pas vrai que ça n'est que du bonheur.
49:45 Un enfant, c'est beaucoup de bonheur
49:47 et des difficultés aussi.
49:48 Et en fait, moi, ce que je constate
49:50 et qui me fait penser qu'il y a des informations
49:51 qui me manquent, c'est que là,
49:53 on parle de parents qui s'informent entre parents,
49:55 qui ont des canaux d'informations.
49:56 Mais les gens les moins informés,
49:58 à mon sens aussi, sur la parentalité,
50:00 c'est les gens qui n'ont pas d'enfants,
50:02 qui ne sont pas encore dans ces cercles-là.
50:04 Et les gens qui ne veulent pas d'enfants aussi.
50:06 Et je pense que l'isolement dont on parlait...
50:08 Pardon, je suis désolée, l'isolation.
50:10 On est des mûrs.
50:12 L'isolement dont on parlait tout à l'heure,
50:14 il vient aussi du fait
50:16 qu'une partie de la population ne comprend pas
50:18 ce que ça veut dire que d'avoir un enfant.
50:20 Moi, j'ai des amis à moi, très proches.
50:22 Je sens qu'ils ne comprennent pas la réalité
50:24 de ce que c'est qu'un bébé qui pleure toutes les nuits.
50:26 Alors, il y a une réalité à laquelle
50:27 ils ne pourront jamais accéder
50:28 parce que tant qu'on n'est pas passé par là,
50:30 on ne peut pas savoir ce que c'est.
50:31 Mais il y a quand même une réalité
50:33 que si les gens la comprenaient,
50:35 par exemple, ils comprendraient
50:36 qu'on n'offre pas des doudous à un bébé qui vient de naître.
50:38 On offre des lasagnes à une mère qui vient d'accoucher.
50:41 On lui offre de la nourriture.
50:42 On lui offre des jours de garde.
50:44 On lui offre un soin de l'entourage.
50:47 Et je pense que l'information,
50:48 il faut qu'elle irradie pas les futurs parents et les parents,
50:52 mais aussi les gens qui ne le sont pas
50:53 et qui peuvent être ce village
50:55 pour les gens qui sont dans un contexte d'isolement.
50:58 Si je peux juste ajouter une chose à la réponse de René
51:01 par rapport à votre question,
51:02 parce que moi aussi j'ai les deux âges
51:04 et j'ai cette expérience sur 20 ans d'information parentale.
51:07 Et en fait, ce qui pour moi a changé,
51:09 c'est que quand j'ai démarré dans ce métier,
51:11 je disais que je travaillais pour la presse spécialisée.
51:13 Aujourd'hui, je suis responsable du service Société
51:16 du magazine Parent,
51:17 et tous les articles que je fais sont aussi dans Le Monde,
51:19 sont aussi dans Libération, sont partout,
51:21 parce qu'il y a vraiment,
51:23 cette question de la parentalité est devenue vraiment
51:26 prégnante, elle est passée dans la rubrique société
51:29 en termes de médias.
51:30 Je trouve que c'est très fort de se dire ça.
51:33 C'était juste pour ajouter ça.
51:35 Juste moi, je voudrais ajouter quelque chose
51:37 qui est assez fou, c'est que quand j'ai...
51:39 Parce que moi, ce que je dis sur le postpartum,
51:41 sur le suicide, surtout depuis que j'ai commencé,
51:43 c'est-à-dire depuis il y a 13 ans,
51:45 mais les journalistes,
51:47 je suis désolée, là,
51:49 s'en fichaient complètement.
51:51 C'est-à-dire qu'en fait, ce que je racontais
51:53 n'avait aucune importance.
51:55 Et je me rappellerai toute ma vie de cette
51:57 journaliste du Figaro à qui je rends
51:59 vraiment hommage aujourd'hui, parce que c'est la seule
52:01 qui avait compris l'isolement urbain ordinaire,
52:04 le suicide, tout ça, elle avait compris.
52:06 Et ça a été la seule. Et ça, c'était en 2014,
52:09 donc c'était à la fois il n'y a pas longtemps,
52:11 et à la fois 1 000 ans, c'était il y a 10 ans.
52:13 Et c'est vrai que c'est assez fou.
52:15 Et donc je pense que quel que soit son bord politique,
52:17 il faut comprendre vraiment que ces vagues de féminisme
52:19 ont permis de comprendre que
52:21 les femmes avaient des choses à dire
52:23 et que ces choses-là étaient intéressantes.
52:25 Donc pour moi, c'est vraiment les vagues de féminisme
52:27 successives qui ont permis. Et moi, avant, on me prenait
52:29 vraiment pour une espèce de semi-débile en blouse rose
52:31 qui faisait "A re, A re" avec les bébés.
52:33 Si, je vous assure, dans la société civile,
52:35 quand je suis arrivée chez les éditeurs, dans les médias,
52:37 une des sages-femmes, c'était vraiment ça.
52:39 Il y avait une vision. Vous, vous êtes pédiatre,
52:41 donc vous connaissez les sages-femmes. Mais je vous assure,
52:43 dans la société civile, c'était terrible. Et en disant,
52:45 le monde a changé, oui, vraiment.
52:47 - Comme tous les sujets qui ont attrait à la vie intime,
52:49 aux rayons, aux rubriques...
52:51 - Ou à l'hyperspécialisation.
52:53 - Voilà, ou aux magazines spécialisés,
52:55 ou la rubrique féminin. Mais en tout cas, ça ne faisait pas
52:57 partie des sujets sérieux
52:59 et des sujets importants, alors que c'est
53:01 tout le contraire.
53:03 - Vous avez été formée par
53:05 sages-femmes et péricultrices, donc je suis
53:07 tout à fait d'accord avec vous. Je pense
53:09 que ce que
53:11 vous décriviez, c'était peut-être aussi
53:13 le fait que l'enfant qu'on a,
53:15 le premier enfant qu'on a, c'est souvent le premier
53:17 qu'on voit de sa vie, le premier nouveau-né
53:19 qu'on a.
53:21 C'est bien souvent la situation
53:23 de
53:25 nombreux parents.
53:27 Mon collègue Patrice Joly voulait vous poser
53:29 une question.
53:31 Annie aussi. C'est Annie
53:33 dans l'ordre, donc j'avais compris que c'était... D'accord.
53:35 Annie.
53:37 - Je voulais revenir, merci pour
53:39 votre travail sur
53:41 tout cet environnement
53:43 de la maternité et de la paternité.
53:45 Ça fait plaisir, et de la parentalité.
53:47 Je voulais revenir sur
53:49 ce qu'on a appelé disruptif
53:51 tout à l'heure, ou la manière
53:53 dont je l'ai compris, entre
53:55 la rupture sur le suivi
53:57 et l'accompagnement qui peut se faire en maternité
53:59 avant et après la grossesse,
54:01 et puis ce
54:03 qu'on nous a
54:05 presque convaincus que
54:07 lors des précédentes auditions,
54:09 que finalement,
54:11 en tant qu'élu, défendant parfois
54:13 des petites maternités, nous sommes
54:15 des irresponsables parce que finalement,
54:17 l'acte d'accouchement
54:19 qui nous arrive
54:21 moins de deux fois
54:23 dans notre vie, donc finalement, c'est pas très
54:25 important,
54:27 la sécurité
54:29 physique est beaucoup
54:31 plus importante que tout le reste.
54:33 Donc, je voulais savoir si
54:35 dans votre témoignage, vous aviez,
54:37 et dans votre travail,
54:39 vous aviez des éléments
54:41 là-dessus, parce que je ne sais pas si c'est quelque chose
54:43 qui est partagé, mais
54:45 est-ce que vous pouvez revenir
54:47 là-dessus
54:49 de manière un peu plus précise ?
54:51 Parce que c'est aussi au cœur
54:53 de l'occupation
54:55 de cette mission. - Je pense que pour y répondre,
54:57 peut-être, est-ce que déjà vous avez
54:59 ces sujets-là, sont des sujets
55:01 abordés par le biais
55:03 de l'éclairage également, c'est important,
55:05 je veux dire, on peut comprendre d'après ce que vous avez dit,
55:07 et je crois
55:09 que c'est vrai, une fois que les gens sont informés
55:11 et au courant
55:13 à la fois des avantages,
55:15 des inconvénients, des risques,
55:17 et enfin, voilà,
55:19 les gens sont libres
55:21 et je pense capables
55:23 d'avoir un choix, que l'on dit,
55:25 éclairé. Est-ce que
55:27 ce débat-là, ces sujets-là,
55:29 c'est... Comment ?
55:31 Oui, c'est la question, est-ce que
55:33 ces sujets-là sont des sujets
55:35 auxquels, voilà,
55:37 vous partagez dans vos émissions
55:39 différentes, vos podcasts, etc.,
55:41 et quels sont à la fois les retours
55:43 que vous percevez
55:45 dans ce grand débat
55:47 qui nous
55:49 fait face aujourd'hui, parce qu'on est sur, quand même,
55:51 aujourd'hui, un débat,
55:53 qui arrive, qui nous arrive,
55:55 donc il est effectivement
55:57 un débat d'experts, de médecins,
55:59 de parturiantes, etc., mais vous,
56:01 puisque vous êtes sur ces débats avec,
56:03 enfin, sociétal, comment
56:05 vous l'envisagez ? Est-ce que vous l'avez
56:07 pris à bras le corps, et quels sont,
56:09 selon vous, les retours que vous entendez ?
56:11 Et la position, peut-être,
56:13 globalement, de la population.
56:15 Je crois
56:17 que ça a été déjà dit, mais je crois
56:19 que c'est un débat théorique,
56:21 parce que les femmes n'ont pas vraiment
56:23 le choix, à part dans les grandes villes,
56:25 et quand elles font partie
56:27 d'une population favorisée,
56:29 elles peuvent choisir une maternité
56:31 en fonction des critères, et donc un type
56:33 d'accouchement, mais je crois que les autres,
56:35 elles prennent ce qu'elles trouvent,
56:37 et à part une infime, je sais plus
56:39 le pourcentage de femmes
56:41 qui accouchent à domicile, mais c'est infime,
56:43 à part celles qui font ce choix-là,
56:45 elles ont pas
56:47 vraiment la possibilité, alors c'est
56:49 un débat qui existe,
56:51 est-ce qu'on accouche avec péril, sans péril ?
56:53 Nous, sur Internet,
56:55 souvent, on va lancer des sondages,
56:57 on fait des grands sujets, etc., mais en vérité,
56:59 on fait ce qu'on peut,
57:01 pareil pour l'allaitement, est-ce qu'on va allaiter,
57:03 est-ce qu'on va pas allaiter, même si on a envie d'allaiter,
57:05 si on tombe dans une maternité où les sages-femmes
57:07 n'ont absolument pas le temps
57:09 de s'occuper de ça, ou qu'on tombe
57:11 sur une maternité où c'est pas favorisé,
57:13 ça marchera pas, donc je crois qu'il y a
57:15 oui, un débat dans la société,
57:17 mais derrière, c'est
57:19 surtout la loterie, quoi.
57:21 Je sais pas ce que Anna dira, mais...
57:23 - Moi, sur la fermeture des petites maternités,
57:25 parce que c'est le sujet,
57:27 moi, je peux vous dire, et je peux vous témoigner
57:29 du grand, grand, grand, immense
57:31 désarroi des populations de ces territoires-là,
57:33 et qu'il y ait pas un désarroi
57:35 qui est fin, je pense vraiment,
57:37 moi, je suis d'accord
57:39 avec les constats du professeur Ville,
57:41 et je vais choquer beaucoup de gens en disant ça,
57:43 moi, je suis d'accord avec ces constats.
57:45 Mais je pense, et c'est là où on n'est pas d'accord,
57:47 je pense que faire des hôtels où on va mettre les femmes
57:49 avant, donc le dernier mois,
57:51 en attendant qu'elles accouchent,
57:53 ou en attendant qu'elles soient déclenchées,
57:55 pour le coup, pour moi, ça, c'est vraiment désastreux,
57:57 et le coût psychique
57:59 de ce type de prise en charge va être
58:01 monstrueux et énorme, déraciner les femmes
58:03 dans ce moment-là, de leur famille,
58:05 de leurs environnements, ce n'est pas possible.
58:07 Donc je pense qu'il y a un choix politique
58:09 qui est de dire, ok, maintenir ces maternités
58:11 dans un niveau de sécurité va être
58:13 un enjeu financier très important,
58:15 mais en fait, je pense, enfin, que ça va
58:17 coûter très, très cher, mais je pense que c'est très, très bien
58:19 que ça coûte très cher, et qu'en fait, on fera
58:21 des économies, parce qu'il y aura moins de dépression du postpartum,
58:23 parce qu'il y aura moins d'état de stress post-traumatique, etc.
58:25 Et je pense que si on met l'argent,
58:27 alors on peut faire venir des gens dans n'importe quel
58:29 territoire, y compris des gens
58:31 de façon stable. Moi, je pense
58:33 que cette histoire des petites maternités est un enjeu
58:35 vraiment important. Mais en tout cas, se dire
58:37 qu'on va faire des grands hôtels, on va mettre les femmes enceintes,
58:39 aïe, aïe, aïe, aïe, aïe, là, on va droit à la
58:41 catastrophe, hein. Et les gens ont raison
58:43 quand ils disent, mais, qu'ils sont en colère,
58:45 enfin, il y a des gens vraiment très en colère, mais
58:47 la colère, je la comprends, je l'entends.
58:49 Non, non, il faut trouver une solution, on ne peut pas faire ça.
58:51 Là, c'est des questions
58:53 d'humanité, on ne peut pas faire ça. On ne peut pas mettre
58:55 les gens dans des hôtels en attendant qu'elles mettent
58:57 bas. Ce n'est pas possible. Voilà,
58:59 ce n'est pas possible. La naissance, c'est un événement
59:01 familial, intime, privé.
59:03 Ce n'est pas possible.
59:05 Voilà pour cette audition sur la question de la périnatalité.
59:07 N'hésitez pas à voir
59:09 les replays et à lire les décryptages.
59:11 C'est sur publicsena.fr. Très belle suite des
59:13 programmes sur Public Sénat.
59:15 [Musique]