Lise est atteinte de phobies d'impulsion, un trouble obsessionnel compulsif méconnu qui se traduit par la peur de commettre des actes graves et répréhensibles : faire du mal à soi-même ou aux autres.
Elle parle ouvertement de ses pensées noires envers elle-même, et les autres, et comment elle a réussi à s'en sortir à l'aide d'un suivi psychologique.
Elle parle ouvertement de ses pensées noires envers elle-même, et les autres, et comment elle a réussi à s'en sortir à l'aide d'un suivi psychologique.
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00:00 me revois en train de me dire si je tue mes parents et si je me jette du haut de l'étage
00:04 et en fait là il y avait tout le scénario qui se déroulait dans ma tête, l'enterrement,
00:07 je voyais le cercueil, enfin voilà ça allait vraiment très très loin.
00:09 Je m'appelle Lise, j'ai 24 ans et je souffre de phobie d'impulsion depuis mon plus jeune
00:13 âge en fait.
00:14 Des phobies d'impulsion c'est un trouble obsessionnel compulsif et en fait c'est la
00:17 peur, panique, soit de faire du mal à autrui ou de se faire du mal à soi, de tuer quelqu'un,
00:21 de pousser quelqu'un dans le métro comme moi ça peut m'arriver.
00:23 Au début de mon enfance quand j'ai commencé à avoir ces crises ouais je pensais que j'étais
00:26 folle parce que je me disais mais attends tu t'imagines tuer tes parents mais ça va pas
00:29 dans ta tête, on n'a pas encore ce recul de se dire peut-être que c'est un trouble
00:32 je sais pas quoi.
00:33 J'en parlais pas à mes parents parce que j'avais peur qu'ils me prennent pour une folle
00:36 et j'avais peur qu'ils aient peur aussi parce que quand tu dis à tes parents ouais papa
00:39 je me vois te tuer avec un couteau, à l'époque j'avais peur qu'ils m'enferment, qu'ils m'emmènent
00:42 je sais pas dans un asile, enfin ouais j'avais vraiment peur de ça.
00:45 Dans ma tête ça se traduit par une espèce de dissociation c'est-à-dire que d'un coup
00:49 j'entends plus rien, je vois plus rien, j'ai l'impression que je suis en dehors de moi-même
00:52 et il y a juste ce flash, ce scénario.
00:55 Par exemple typiquement moi ça m'arrive beaucoup quand je suis dans les transports et en fait
00:58 là je vais vraiment imaginer pousser la personne et là je vais vraiment avoir l'image de son
01:02 corps écrasé par le métro et j'ai vraiment du mal à revenir dans moi-même à ce moment-là
01:08 c'est vraiment une dissociation qui peut durer assez longtemps.
01:10 Le pire scénario que je me suis jamais fait, moi j'étais adolescente au moment de Charlie
01:15 Hebdo, le Bataclan tout ça, et du coup j'ai eu cette phobie d'impulsion horrible de devenir
01:20 terroriste.
01:21 Je me disais ok bah là je vais adhérer à leurs idées, je vais devenir terroriste,
01:25 je vais me faire sauter et j'avais vraiment des visions de moi dans l'école par exemple
01:31 et avec une bombe en train de tuer tout le monde quoi et ça c'était vraiment hyper
01:34 déroutant parce que je me disais mais je sais pas si jamais demain je me réveille
01:37 et que ouais j'adhère à leurs idées, j'ai aucun contrôle là dessus en fait.
01:40 J'ai eu de la chance, ça n'a pas vraiment freiné ma relation de couple.
01:43 Au début je lui en ai pas parlé parce que c'est pareil je me disais on va y aller soft,
01:47 après au bout d'un moment ouais je lui ai dit parce que quand on cuisinait ensemble
01:49 typiquement je me voyais le planter quoi.
01:51 Au début je me suis dit je vais pas lui dire, il va partir en courant et en fait au final
01:55 un jour je lui ai dit.
01:56 Après je l'ai rassuré aussi en lui disant que tous ceux qui souffrent de ces troubles
01:59 ne passent jamais à l'actif et donc voilà je l'ai vraiment rassuré là dessus et il
02:02 n'était pas trop inquiet de toute façon.
02:03 C'est même pas une question d'envie parce qu'on n'a jamais envie de planter quelqu'un
02:06 même que ce soit quelqu'un qu'on aime ou qu'on aime pas.
02:08 C'est ça la différence aussi entre la phobie d'impulsion et juste se dire je vais le planter.
02:13 C'est que la phobie d'impulsion ça arrive avec des gens que vous adorez, ça arrive avec
02:17 des gens que vous chérissez, ça arrive quand vous allez bien, ça arrive quand vous allez
02:20 mal.
02:21 C'est pas vous qui choisissez en fait c'est pas juste un coup de sang on se dit purée
02:23 lui je vais le planter il me saoule.
02:24 Envers moi-même j'ai eu beaucoup beaucoup de pensées noires.
02:27 Ça peut être déclenché par une dispute, ça peut être déclenché par n'importe
02:30 quel petit facteur, n'importe quel petit grain de sable qui va se mettre dans ma routine.
02:33 Je vais tout de suite me mettre à penser à mon suicide, à ma mort, à la réaction
02:38 de mes parents, à leur deuil et ça c'est encore assez présent quand même.
02:42 Il y a vraiment des moments où par exemple les tocs ont vraiment eu un impact négatif
02:46 sur moi donc tout ce qui est scarification, tout ce qui est aussi excès de médication.
02:51 J'en étais venue à en prendre 20-30 par jour.
02:54 Toutes les semaines j'allais chez des médecins différents et je racontais des bobards pour
02:57 me faire faire des prescriptions.
02:58 J'en suis pas fière mais c'était vraiment un engrenage terrible.
03:01 J'ai ressenti que le trouble était vraiment handicapant quand ça en est venu à que ce
03:04 soit tous les jours en fait.
03:05 Ça devient handicapant à partir du moment où ça reste une journée, deux journées,
03:09 trois journées et vous en rêvez la nuit et c'est ça en fait la différence avec juste
03:13 une pensée négative c'est que les troubles vraiment ils restent ancrés en vous et ça
03:16 peut durer des jours voire même des mois en fait.
03:19 J'ai décidé de me faire suivre en 2020.
03:21 Toutes mes amies me disaient "mais fais-toi suivre, fais-toi suivre" et j'avais toujours
03:23 cette idée de me dire "psychiatre c'est pour les fous" et en fait j'allais de plus
03:27 en plus mal et au bout de la peut-être 3 ou 4e séance avec mon psychiatre en fait
03:31 ça a débloqué des souvenirs pas hyper cool, les souvenirs d'un viol en fait.
03:36 Qui a du coup expliqué tout mon mal-être et qui a mené au diagnostic de trouble borderline
03:41 puis au diagnostic de phobie d'impulsion.
03:43 Depuis que je suis suivie je me rends compte à quel point la parole libère les choses
03:47 en fait et du coup le fait d'avoir tout emmagasiné en moi je pense que oui ça a vraiment aggravé
03:51 les troubles et que peut-être que ça se serait pas autant développé si j'en avais parlé
03:56 dès le début.
03:57 Ce que je voudrais dire aux gens qui pensent être atteints de phobie d'impulsion, parlez-en
04:00 parce que vous n'êtes pas seul mais loin de là, vous verrez que vos proches seront
04:05 compréhensifs et plus vous allez en parler et plus ça va débanquer le truc de se dire
04:09 "je suis fou, je suis un meurtrier" et moins vous allez avoir ces phobies d'impulsion
04:12 donc parlez-en.